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MME LAGARDE ET LA DÉONTOLOGIE FINANCIÈRE



Dans une résolution circonstanciée et - fait relativement rare - “personnalisée”, le Parlement européen s’est ému du “pantouflage” du Directeur de l’Agence Bancaire Européenne (EBA - M.Adam Farkas) vers le secteur privé, en l’occurence vers la direction de l’Association des Marchés Financiers Européens (AFME).


On sait que la EBA est notamment chargée d’effectuer les stress tests sur les principaux établissements financiers de l’UE - et que la AFME assure la représentation (et le lobbying) des grandes banques d’investissements actives dans l’Union. 

Les détails de cette affaire figurent ici


Le texte de la résolution parlementaire - qui préconise une révision globale des règles de “conflit d’intérêt” entre fonctions publiques et privées - figure ici.


C’est notamment à la suite d’une alerte de l’ONG “Finance Watch” que cette “affaire” - véritablement emblématique - a pris une dimension politique entrainant également une enquête parallèle du Médiateur européen.


Il apparait que la EBA (membre du “groupe” de la BCE présidé par Mme Lagarde depuis le 1er novembre 2019) aurait pris toutes les mesures juridiquement disponibles pour s’assurer que, dans ses nouvelles fonctions, M. Farkas ne fasse pas usage des "informations sensibles” dont il dispose au profit des banques soumises au contrôle de la EBA.


On saura dans les prochaines semaines si ces garanties sont jugées suffisantes tant par la nouvelle Direction de la BCE que par le Parlement, le Médiateur voire la Commission.


Il est clair que le phénomène croissant de “revolving doors” entre les Institutions européennes et le secteur privé pose des problèmes particulièrement délicats dans le domaine financier au vu de la puissante influence des grands établissements privés et de l'impact potentiel de leurs activités sur l’ensemble de l’économie européenne. (1)


Impact potentiellement démultiplié du fait de la financiarisation généralisée de l’économie mondiale et du risque corrélatif entrainé par le gonflement non maitrisé de “bulles financières” de différentes natures.


Ce risque est d’ailleurs à mettre en parallèle avec deux autres facteurs aggravants :

  • la faiblesse des moyens dont dispose la EBA pour effectuer un contrôle véritablement efficace des grands établissements bancaires : bien connue des spécialistes, cette faiblesse a été mise en exergue dans un récent rapport de la Cour des Comptes Européenne dont l’analyse figure ici.

  • le risque que représente, du fait du Brexit, la sortie de la place de Londres de l’orbite européen (règlementation et contrôle) et le probable renforcement de ses liens - déjà fort étroits - avec le système financier américain dont l’influence déterminante sur le marché européen a été démontrée lors de la crise de 2008. Voir ici.


Il serait donc souhaitable que “l’affaire Farkas” provoque un réveil salutaire des instances politiques de l’UE pour s’assurer que - d’une manière générale - la régulation et la stabilité du système européen soient significativement renforcées.


Exercice certes fort complexe du fait de l’internationalisation/interpénétration croissante des activités financières au niveau mondial - ainsi que de la "diversification biologique” en pleine expansion des opérateurs et mécanismes financiers de toutes natures. Mais exercice incontournable si l’UE veut conserver aux autorités politiques er administratives un minimum de contrôle et de maitrise sur des marchés qui ont, à plusieurs reprises, démontré leur irresponsabilité collective.


L’occasion pourrait être donnée par l’arrivée aux commandes de la Commission et de la BCE (ainsi que de l’EBA) de nouveaux responsablessusceptibles de mener à leur terme des réformes déjà envisagées et, si nécessaire, d’en effectuer de nouvelles.


À cet égard, le rôle de la nouvelle Présidente de la BCE - Mme Lagarde - pourrait s’avérer déterminant.



Jean-Guy Giraud  22 - 01 - 2020 

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(1) D'autant plus que, au sein même de la BCE, la place prise progressivement par les représentants du secteur privé pose déjà problème comme l’avait montré l’enquête d’une autre ONG ("Corporate Europe Observatory”) en 2017 - enquête reprise dans :

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