Lors d’une récente visio-conférence (1), M. Sando GOZI (2) - qui participe directement à la fois aux travaux de la Conférence et à ceux de la Commission des Affaires constitutionnelles du PE (3) - a estimé que le Parlement ne devrait pas prendre de position précise et actualisée sur les sujets en débat tant que le "dialogue citoyen" n’aurait pas dégagé les grandes lignes de l’opinion sur les différents sujets soumis à consultation.
Cette attitude est certes respectueuse de l’inspiration démocratique de l'exercice mais présente quelques inconvénients :
il est peu probable que le débat aborde en profondeur la question centrale de la “gouvernance” de l’UE (cad sa capacité à gouverner, à prendre des décisions) qui ne figure d’ailleurs pas à l’”ordre du jour” officiel,
recueillir les aspirations des citoyens en matière d’environnement, de santé, de sécurité, de respect des droits humains, de progrès social, etc … ne suffit pas : encore faut-il que l’UE ait les moyens institutionnels de mettre en oeuvre ces aspirations,
seul le PE peut aborder ces questions et proposer des réformes : ni le Conseil ni la Commission ne souhaitent les évoquer (pas plus d’ailleurs que celle de l’élargissement de l’Union) (4),
au sein de la Conférence plénière, les 108 MPE doivent avoir une position commune (5) sur ces points afin de pour pouvoir peser sur le débat,
cette position doit donc être définie en temps utile - par une résolution du PE - , sans attendre le stade ultime de la préparation de la “déclaration" finale de la Conférence,
M. Gozi est d’ailleurs le rapporteur de la Commission des Affaires constitutionnelles sur le point précis de la gouvernance (6)
il a élaboré un document de travail (7) très complet sur la (seule) question - centrale il est vrai - du “blocage causé par le vote à l’unanimité” au sein du Conseil (7).
Il est toutefois possible que, au sein du PE lui-même (voire de la Commission des Affaires constitutionnelles), les positions des principaux groupes politiques sur l’ensemble des questions de gouvernance ne soient pas encore précisément arrêtées ni coordonnées. Mais c’est, semble-t-il, une raison de plus pour accélérer les travaux internes du Parlement.
En résumé, le rôle du PE est certes de tenter de discerner - et d’être le porte-parole des principaux courants d’opinion - sur “le futur de l’Union”, mais c’est aussi guider cette opinion sur des sujets tels que la gouvernance qui ne sont pas de sa responsabilité directe.
Autrement dit - pour reprendre la formule célèbre : “Nous sommes leurs représentants, nous devons donc les suivre” - le PE doit-il vraiment attendre une très éventuelle opinion claire et majoritaire émanant du “plateau” des contributions sur le site de la Conférence ? Ou doit-il d’ores et déjà expliquer les graves problèmes de gouvernance (8) qui affectent le fonctionnement de l’UE et proposer les solutions que lui inspirent son expérience directe en la matière ainsi que les précédentes résolutions du PE ?
Jean-Guy Giraud 30 - 06 2021
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(5) lors des deux Conventions sur la Charte et sur le projet de Constitution européenne, la position de la délégation du PE avait été très soigneusement établie à l'avance
(8) problèmes qui vont bien au delà des seules questions des modalités d’élection du PE et de nomination du Président de la Commission voir : https://www.lesamisdutraitedelisbonne.com/post/quand-les-européens-entrent-en-conférence
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