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UNION EUROPÉENNE : LE TEMPS DE LA RÉFORME EST VENU, PARLONS-EN !



Rappel

On sait que le Parlement européen s’est engagé en Mai 2022 dans une procédure de réforme de l’Union en vue de permettre à celle-ci de mieux faire face aux nouveaux défis apparus ces dernières années dans différents domaines tels que les crises environnementales, sanitaires, économiques et - plus gravement encore - militaires.


Cette réforme vise à renforcer les moyens d’action de l’UE tant dans le cadre des traités en vigueur que dans la perspective d’une révision des Traités.

La Commission des Affaires Constitutionnelles (AFCO) du Parlement a entrepris la préparation de propositions qui devraient être adoptées en Juillet 2023 - puis soumises au Conseil européen via le Conseil selon la procédure prévue par l’article 48 TUE.

Cette commission dispose à présent des avis des principales autres commissions concernées par la réforme - avis sur lesquels se basera le rapport final de l’AFCO. Celui-ci comportera en principe - outre des recommandations portant sur la pleine utilisation des dispositions actuelles des Traités - des propositions précises de modifications et d’ajouts à ces dispositions. Les avis de 4 commissions ont déjà été présentés ici séparément (1). Figure ci-dessous la présentation groupée des avis de sept autres commissions


Culture et éducation



Dans son avis assez sommaire, la Commission de la Culture et de l’Education (CULT) ne demande qu’une seule modification des Traités, mais elle est d’importance : elle propose que la question de l’éducation devienne une "compétence partagée" entre l’UE et les Etats membres - et non plus une simple "compétence d’appui » de l’UE aux politiques nationales.


Mais elle ajoute que, au minimum, ce « partage » devrait concerner la matière de « l’éducation civique » et plus précisément : l’histoire et les valeurs européennes, l’enseignement informatique et linguistique, l’éducation environnementale et économique de base et les sciences techniques(notamment les mathématiques).


Elle insiste sur le fait que, sur la base des Traités actuels, les nombreuses propositions faites par la Conférence sur l’Avenir de l’Europe en matière d’éducation et de de culture devraient être prises en compte afin de renforcer le sentiment d’appartenance à l’Union chez les citoyens (notamment la jeunesse).



Emploi et Affaires Sociales



Dans ces deux domaines vastes et diversifiés qui relèvent pour partie des compétences partagées entre l’UE et les Etats membres, la Commission sur l’Emploi et les Affaires Sociales (EMPL) propose trois types de modification des Traités :

  • introduire formellement le concept de "progrès social" parmi les objectifs de l’UE et annexer aux Traités un « protocole sur le Progrès Social »,

  • intégrer dans les Traités le « Pilier Européen des Droits Sociaux »

  • remplacer le vote unanime du Conseil par la procédure ordinaire de co-décision dans une série de questions telles que la non-discrimination, l’exclusion sociale, la représentation collective des ouvriers/employeurs, etc …


D’autre part, la Commission EMPL souhaite une participation plus active du Parlement dans la procédure dite du « Semestre européen » et dans celle des « Objectifs Intégrés pour la Croissance et l’Emploi ». Elle demande la création d’un « Paquet Européen temporaire de Résilience Sociale »pour faire face aux conséquences socio-économiques de la guerre en Ukraine (notamment via le refinancement du programme SURE).


Plus généralement, elle propose une révision de la gouvernance économique de l’UE afin que la justice sociale aille de pair avec l’objectif de compétitivité.



Industrie, Recherche et Energie



La Commission pour l’Industrie, la Recherche et l’Energie (ITRE) estime que, dans ces trois secteurs, la plupart des réformes et des progrès peuvent être obtenus sans modification des Traités.


Dès lors, elle ne propose que la révision (marginale) de trois articles des Traités afin d’introduire la co-décision pour l’adoption des programmes cadres de recherche et la création d’entreprises communes - ainsi que pour préciser les objectifs d’efficacité et de durabilité de la politique énergétique de l’UE.


La modestie de ces propositions peut paraitre étonnante au vu de l’importance de ces trois secteurs dans la vie économique de l’Union. Les Traités actuels ne consacrent qu’un seul article relativement bref à la politique industrielle et à la politique énergétique de l’UE. Un élargissement/renforcement de ces bases juridiques aurait pu être envisagé par la Commission ITRE.



Contrôle budgétaire



La Commission du Contrôle budgétaire (CONT) a rendu un avis centré sur une seule question : elle demande que les Traités confirment explicitement que le Parlement soit chargé de donner la décharge budgétaire annuelle sur toutes les sections du budget cad ceux de "toutes les Institutions, organes, offices et agences de l’UE » - et pas seulement sur celui de la Commission comme le prévoit l’art. 319 TFUE. En pratique, le PE se prononce déjà sur l’ensemble de ces budgets mais les effets juridiques de ces décharges restent incertains.


La Commission CONT est une des plus actives du PE et participe très activement aux efforts de lutte contre les irrégularités et fraudes au détriment des finances de l’Union. Elle se heurte fréquemment - sur le plan juridique - à l'insuffisances des moyens de contrôle de la Commission et s’efforce notamment d’obtenir un renforcement de ces moyens via une révision du Règlement Financier de l’UE.


Toutefois, les Traités n’établissent pas clairement la responsabilité centrale de la Commission dans la gestion des crédits européens par les Etats membres. À cet égard, il aurait pu être utile de préciser dans le texte des Traités que « La Commission exécute le budget et en contrôle l’utilisation en coopération avec les Etats membres » (art. 317 TFUE).



Agriculture et développement rural



La Commission pour l’Agriculture et le développement rural (AGRI) se prononce très clairement et brièvement pour un maintien en l’état de tous les articles des Traités relatifs à la Politique Agricole Commune.


Elle estime que ceux-ci son restés pertinents tout au long de six décades, ont permis d’effectuer des réformes successives et constituent une base adéquate pour l’adaptation future de la PAC à de nouveaux défis.



Commission pour les Libertés, la Justice et les Affaires Intérieures



Dans un long avis très détaillé, cette Commission (LIBE) passe en revue les nombreux secteurs dont elle a la charge : démocratie, état de droit, droits fondamentaux, asile, immigration, coopération judiciaire et policière …


Pour chacun d’eux, elle propose de nombreux et significatifs amendements aux textes des Traités et/ou de la Charte des droits fondamentaux. Les principaux d’entre eux sont les suivants:

  • utilisation généralisée de la procédure législative de co-décision dans tous les secteurs concernés,

  • article 7 TUE (procédure relative à la violation des valeurs de l’UE) : passage au vote majoritaire du Conseil, droit du PE de déclencher la procédure, extension des sanctions applicables, création de nouveaux mécanismes de contrôle du respect des valeurs de l’UE (art.2 TUE) et possibilité de suspension du versement des fonds européens,

  • application horizontale de la Charte à toutes les politiques de l’UE et à toutes les actions des Etats membres dans les domaines de compétence de l’UE, inclusion de la Charte dans le corps même des Traités,

  • création d’un Statut de la Citoyenneté Européenne, possibilité d’accorder la citoyenneté à des résidents étrangers, interdiction des mécanismes d' « achat » de citoyenneté européenne, droit de vote généralisé des citoyens européens résidant dans un autre Etat membre,

  • inclusion dans les Traités de la création d’une Autorité Européenne des droits fondamentaux,

  • insertion dans les Traités et dans la Charte de plusieurs clauses relatives aux inégalités liées au genre et aux droits sexuels et de reproduction - y compris le droit à l’avortement légal,

  • extension des compétences de l’UE en matière d’asile et d’immigration et application de la co-décision dans ces domaines,

  • compétence élargie de l’UE pour établir des standards minimum en matière de coopération judiciaire et policière.


La Commission LIBE propose ainsi un élargissement et un renforcement systématiques et substantiels des bases juridiques des Traités dans ces différents domaines. Elle entend ainsi réagir à la dégradation de la protection des valeurs et droits fondamentaux constatée dans certains Etats membres et remédier à la faiblesse constatée des moyens d’action de l’UE.

Commission pour les Droits des Femmes et l’Égalité des Genres


Cette Commission (FEMM) présente son avis sous forme d’un tableau exhaustif d’une vingtaine d’amendements à différents articles des Traités/Charte - ainsi qu’à la proposition de résolution globale de l’AFCO.


Elle entend ansi introduire dans tous les articles concernés des Traités (de façon systématique et parfois très détaillée) les notions d’égalité des genres et de droits sexuels. Il est donc difficile de résumer ce texte qui doit être lu dans le corps même de l’avis. Dans tous ces cas, elle demande que les décisions législatives découlant de ces nouvelles bases juridiques soient prises selon la procédure de co-décision.


Par cet avis très volontariste, la Commission FEMM souhaite sans doute « graver dans le marbre » au niveau de l’Union des aspirations sociétales récentes et fortes qu’elle estime insuffisamment prises en compte dans les textes (Traité de Lisbonne et Charte) rédigés au début des années 2000.


Jean-Guy Giraud 14 - 04 - 2023


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