L’UE est, de loin, la pemière pourvoyeuse d’aide internationale à l’Ukraine - notamment depuis la “révolution de Maidan” suivie de l’agression russe de 2014.
Au delà des concessions commerciales prévues dans l’accord d’association entré en vigueur en 2016, l’aide financière de l’UE a été de l’ordre de 2,8 milliards Euros par an sur la période 2014/2019 (1).
Lutte contre la corruption : une priorité affichée mais des résultats limités
Une partie de cette aide concerne la lutte contre la corruption (2) qui consiste principalement à conseiller les autorités nationales et régionales - ainsi que les organisations de la société civile - sur les moyens de lutter contre ce fléau endémique.
Si l’on en juge par les rapports des organisations internationales spécialisées (3) et par les récurrents “scandales” rapportés par la presse, l’efficacité de cette lutte apparait limitée, notamment pour ce qui concerne les relations entre le pouvoir et les “ oligarques”(4).
Condamnable sur le plan civique, déstabilisatrice sur le plan politique et démocratique, la corruption a aussi pour effet de détourner au profit de certains intérêts privés une partie de l’aide financière fournie par l’UE.
Or celle-ci se trouve, dans les faits, largement démunie de moyens d’action véritablement efficaces - cad directs - pour enrayer ce phénomène. Tant le respect (scrupuleux) du principe de souveraineté que le risque (réel) de froisser la susceptibilité des dirigeants (voire de l’opinion, influencée par ceux-ci) n’ont pas permis jusqu’ici à l’UE de s’attaquer frontalement à ce problème.
D’autant plus que l’Ukraine peut obtenir des aides d’autres États voisins ou éloignés indifférents à la question de la corruption - et même, dans certains cas, utilisant ce moyen pour canaliser leur “aide" et accroitre leur influence politique sur les dirigeants.
C’est probablement pour cette raison que l’aide de l’UE à l’Ukraine - et notamment à sa “société civile" - revêt une forme très diversifiée et axée sur la (ré)éducation des différentes strates administratives (notamment judiciaires) du pays. Il en résulte une certaine atomisation des actions entreprises, une grande complexité de gestion et une extrême difficulté à évaluer l’efficacité globale de l’appui ainsi fourni.
Un problème qui nécessite une nouvelle approche
Problèmes que l’on retrouve d’ailleurs dans les relations de l’UE avec les États candidats des Balkans et ceux des autres États du Partenariat Oriental. Mais aussi, diront certains, à l’intérieur même de l’UE…
Au vu de l’ampleur considérable des efforts financiers (et humains) déployés par l’UE pour assister le développement des pays de son environnement plus ou moins proche, la question d’un meilleur contrôle de l’utilisation de cette aide est aujourd'hui posée.
Cette question est ouvertement débattue dans le contexte de l’adoption du prochain cadre financier pour la période 2021/2027 - et des formes plus contraignantes de conditionnalité des aides sont envisagées. En dépit de la difficulté du problème, tant la limitation des ressourcesdisponibles pour les besoins propres de l’UE que la lassitude de l’opinion exigent une réaction déterminée de l’Union. Dans une certaine mesure, la "retenue" de l'UE est contre-productive et un changement de méthode est devenu nécessaire.
C’est certainement une question dans laquelle le Parlement européen, défenseur par nature des valeurs démocratiques (y compris du respect de l’état de droit) devrait s’investir d’avantage. Co-autorité législative et budgétaire, il a les moyens de suppléer aux hésitations diplomatiques du Conseil et de la Commission. Représentant direct des citoyens, il est responsable devant eux de l’efficacité de l’action de l’Union comme de la bonne utilisation des deniers publics.
Jean-Guy Giraud 05 - 12 - 2019
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(2) https://euaci.eu/who-we-are/about-programme (3) https://en.wikipedia.org/wiki/Corruption_in_Ukraine (4) https://www.lesamisdutraitedelisbonne.com/post/partenariat-oriental-fraudes-à-grande-échelle et https://www.bruxelles2.eu/2019/11/22/des-milliards-evapores-en-ukraine-et-en-moldavie-ce-nest-pas-aux-europeens-de-financer/
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