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SOMMENT DE SOFIA : L’OUVERTURE DE LA PORTE DES BALKANS



Le 17 mai prochain aura leu à Sofia - à l’initiative de la présidence bulgare du Conseil - un sommet européen dont le but sera d’ “insuffler une nouvelle dynamique aux relations entre l’UE et les Balkans occidentaux” (1).


En route vers de nouvelles adhésions


En réalité, ce sommet sera sans doute l’occasion - pour le Conseil européen - de confirmer solennellement l’engagement de l’UE à poursuivre (sinon accélérer) le processus d’élargissement de l’UE aux six États concernés (2).


Un parallèle peut être établi entre le sommet de Sofia et celui de Copenhague qui avait - en 1993 - établi le principe de l’élargissement de l’UE aux neufs États d’Europe centrale bientôt suivis de deux autres (Slovénie et Croatie).


C’est donc la perspective d’une UE de 33 États membres - dont une majorité (18) d’ États post-communistes - qui sera officiellement ouverte à Sofia.


Toujours la “géo-stratégie d’élargissement"


L’épisode de Sofia s’inscrira dans la continuité d’une “stratégie d’élargissement” soutenue de façon persévérante et unanime par les trois Institutions (Conseil, Commission et Parlement). 


Cette stratégie est assez bien résumée par cette déclaration introductive de la Commission faite au sujet des Balkans :

“La perspective d’adhésion à l’UE des Balkans occidentaux est dans le propre intérêt de l’Union, du point de vue politique, sécuritaire et économique. C’est un investissement géo-stratégique dans une Europe forte, stable et unie basée sur des valeurs communes”. 


Et la Commission d’ajouter : 

“ L’adhésion est un puissant outil de promotion de la démocratie, de l’état de droit et du respect des droits fondamentaux”. (!)


Si une vision purement cartographique montre en effet que les Balkans occidentaux “font partie de l’Europe" et de l’UE (entourés notamment par 4 des nouveaux États membres), cette donnée géographique ne devrait toutefois pas épuiser le sujet.

Les questions qui pourraient être posées à Sofia ...


À Sofia, les chefs d’États et de Gouvernement pourraient (devraient) se poser au moins trois autres questions :

  • quel bilan, quelles leçons l’UE peut-elle tirer - au bout de 14 ans - du précédent élargissement vers l’Est , tant du point de vue de son propre fonctionnement (unité/solidarité) que de celui de l’évolution interne des nouveaux membres ? 

  • l’UE sera-t-elle en mesure, dans un avenir proche, d’intégrer six autres États (dont la situation interne apparait plus problématique encore que celle des précédents adhérents) sans compromettre d’avantage le nécessaire renforcement de son processus d’intégration ? 

  • l’adhésion de ces États à l’UE résoudra-t-elle véritablement la question "géo-stratégique” (3) qui semble l’emporter sur toute autre considération ?

… mais qui ne le seront pas


Mais ces questions ne seront vraisemblablement pas abordées à Sofia et ce pour quelques raisons simples :

  • le poids de la “pensée unique”, de "l’impératif catégorique” qui rendent “politiquement incorrecte”  toute remise en question de la stratégie d’élargissement enclenchée à Copenhague, (4)

  • l’absence (en fait la non-recherche) de toute solution alternative à l’adhésion pleinière,

  • le sentiment que la date de ces adhésions se situe dans une perspective à moyen terme - cad au delà des mandats des dirigeants en place, (5)

  • la pression des nouveaux États membres qui pourraient faire bloc contre tout atermoiement du processus,

  • le sentiment, chez certains, que l’UE finira inévitablement par se diviser en deux ou plusieurs cercles ou vitesses permettant (libérant) des avancées sélectives pour quelques uns - au risque vider le tout d’une partie de sa substance.   

L’impact sur l'opinion


Il restera à évaluer comment la probable “Déclaration de Sofia” - confirmant le nouveau projet d' élargissement de l’UE - sera accueillie par l’opinion.


Beaucoup a été écrit sur le caractère anxiogène et démotivant pour le public (au moins dans les anciens États membres) de l’extension indéfinie de l’Union. L’image - plutôt négative - que se fait l’opinion de la situation actuelle des pays concernés (s’ajoutant à celle relative aux nouveaux États membres) aggravera ce sentiment.


À un an à peine des élections européennes de Mai 2019, la "Déclaration de Sofia" risque de créer un climat peu propice à la participation au scrutin mais favorable au vote en faveur des partis les plus euro-sceptiques.


L’ouverture des Balkans : un pont trop loin l’Europe ? (https://www.bruxelles2.eu/2018/01/15/elargissement-le-pont-trop-loin/)


Jean-Guy Giraud

__________________________________      

(2) Albanie, Bosnie-Herzégovine, Serbie, Montenegro, ARY de Macédoine, Kosovo

(3) l’ "impératif géo-stratégique” des élargissements gagnerait à être mieux argumenté - surtout au vue de l’évolution constante et finalement imprévisible des rapports de force entre les grandes puissances de la région et au-delà.

(4) il est toutefois possible que le Président Macron émette à cet égard une voie discordante.

(5) il semble d’ailleurs que, contrairement aux adhésions en bloc des pays d’Europe centrale, celui des États des Balkans pourrait se faire graduellement.    

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