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LES TESTS BANCAIRES VICTIMES …DU STRESS



Le report des stress tests bancaires

Le 12 Mars 2020, l’Autorité Bancaire Européenne (ABE) a décidé de reporter à 2021 le prochain rapport bi-annuel - dû en 2020 - sur la capacité de résistance des grandes banques “systémiques” de l’UE aux chocs financiers et économiques - cad les fameux “stress tests” (1). 


L’explication assez lapidaire donnée par l’ABE - avec l’accord de la BCE - pour ce report est d’épargner aux banques (qui fournissent l’essentiel des données) un surcroit de travail au moment où la crise du COVID requiert toute leur attention et leurs efforts de soutien de l’économie. D’autre part, les autorités européennes encouragent les établissements financiers à utiliser toute la “souplesse" permise par la réglementation fiduciaire et prudentielle pour prioriser ce soutien par rapport aux exigences globales de sécurité et de stabilité financière. 


Ce report et cet assouplissement peuvent apparaitre préoccupants dans la mesure où le système bancaire - et notamment les établissement systémiques - sont fortement sollicités et impactés par la crise économique sans précédent que traverse l’UE et que leur état de santé requiert en conséquence une vigilance et un monitoring accrus.


Les insuffisances de stress tests

D’autre part, le mécanisme lui-même des stress tests - pratiqué depuis 2014 - a révélé de graves insuffisances et fait l’objet de critiques répétées de la part des instances et observateurs spécialisés. 


Un rapport de la Cour des Comptes - relatif au dernier exercice de 2018 - a détaillé les failles et fragilités de cet exercice que l’ABE avait à l’époque reconnues. En résumé, l’ABE n’avait pas contesté que l’essentiel des tests était effectué par les banques elles-mêmes sous la surveillance et l’autorité des organes nationaux de contrôle. Son rôle se limitant à établir des questionnaires (templates) selon sa propre méthodologie et à assurer une coordination (assez lâche) des activités de ces organes (2).


La conclusion principale de la Cour des Comptes était que “l’ABE devrait davantage centrer ses tests de résistance sur les risques systémiques à l’échelle de l’UE”. Avertissement qui résonne particulièrement fort à l’heure où ces banques doivent précisément faire face à un risque systémique totalement nouveau tant par sa nature que par son ampleur.


C’est donc dans ces circonstances que l’on devra attendre au mieux jusqu’au deuxième semestre 2021 pour connaitre la situation de solvabilité et de liquidité des principales banques européennes. 


Le cas particulier des banques de crédit

Si la notion de risque systémique englobe l’ensemble des activités des marchés financiers (et notamment des produits dérivés), la situation des banques de crédit (aux particuliers et aux entreprises) est particulièrement sensible car susceptible d’impacter directement les épargnants. 


Par ailleurs, une récente étude sur la vulnérabilité du système financier (3) montre que tant la complexité actuelle des bilans des grandes banques que leur profond engagement dans les activités “dérivées" et la profonde imbrication des liens inter-bancaires rendent ce système particulièrement instable et vulnérable. 


Les moyens théoriques de restreindre cette vulnérabilité sont connus : "séparation des activités de banque commerciale et de banque d'investissement - réduction de la taille des établissements - imposition d’un seuil maximum de tolérance en matière de perte potentielle - exiger un niveau minimum de qualité de crédit - limitation de la dette en proportion des dépôts", …(3).  


Autant de mesures qui ne relèvent pas directement de l’ABE mais qui pourraient inspirer une initiative conjointe de la Commission et de la BCE. Celles-ci - surtout la première - ont déjà oeuvré dans cette direction mais se heurtent aux résistances de la profession (parfois relayées par les autorités nationales) craignant une perte de compétitivité sur le marché international. 


On voit donc, au total, l’importance et l’urgence de s’assurer tout particulièrement - en continu - de la solidité des banques dépositaires de l’épargne privée dans un environnement plus précaire que jamais. Aussi insuffisants soient-ils, les stress tests demeurent le principal outil disponible de mesure et de contrôle de cette solidité. 


Il reste donc à espérer que la prochaine série de tests ne soit pas inutilement retardée et que ses modalités soient même adaptées et renforcées au vu des nouvelles circonstances.



Jean-Guy Giraud  03 - 11 - 2020

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