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LA RÉVISION DES TRAITÉS : POLITIQUE ÉTRANGÈRE ET DE SÉCURITÉ/DÉFENSE - suite 4



La Commission des Affaires Etrangères du Parlement Européen (AFET) vient de présenter ses propositions relatives à la révision des Traités - dans le cadre de la procédure engagée officiellement par le PE sur la base de l’article 48 TUE (1).


Ces propositions sont relatives à la politique étrangère et de défense de l’UE. Elle visent à modifier plusieurs articles de façon à renforcer l’efficacité de la politique extérieure de l’Union. Il est notamment demandé de remplacer le vote à l’unanimité au sein du Conseil - facteur de blocages et de lenteurs - par le vote majoritaire (éventuellement renforcé) des Etats.


La Commission prend appui sur les recommandations émises par les citoyens dans le cadre de la Conférence sur le Futur de l’Europe. D’autre part, il est clair que l’agression russe contre l’Ukraine et la nouvelle stratégie impérialiste et non-démocratique de la Russie en Europe légitiment une important renforcement des moyens d’action de l’Union tant en matière diplomatique que militaire.


Les propositions de l’AFET - ainsi que celles d’autres commissions parlementaires - ont été transmises à la Commission des Affaires Constitutionnelles (AFCO) saisie au fond. Celle-ci devra rassembler l’ensemble des propositions et proposer au PE un rapport global sur la révision des Traités.


Une fois adopté, ce rapport sera transmis au Conseil puis au Conseil Européen. En vertu de l’article 48 TUE, celui-ci pourra décider - à la majorité simple - d’ouvrir formellement la procédure de révision en convoquant une Convention (composée de représentants du Parlement Européen, des Parlements nationaux, des Chefs d’Etat et de gouvernements et de la Commission).


La principale proposition de l’AFET - très radicale mais pleinement justifiée au vu de la transformation brutale de la scène politique et sécuritaire européenne - concerne la passage généralisé au vote majoritaire des Etats membres pour la prise de décision en matière non seulement de politique étrangère mais surtout de défense. Lorsqu’il s’agira d’initiatives de caractère militaire (Art. 42 TUE), une majorité renforcée (2) sera nécessaire.


Une telle modification des traités permettrait de mettre fin aux blocages répétés causés par une utilisation abusive du droit de veto de la part d’un gouvernement (ou d’une petite minorité d’entre eux). Elle permettrait au Conseil, dans son ensemble, de s’efforcer véritablement de rechercher un accord consensuel (cad très majoritaire) sur les questions qui lui sont soumises, notamment par le Haut Représentant.


L’AFET propose d’ailleurs que le statut du Haut Représentant soit rehaussé en le requalifiant de « Ministre des Affaires étrangères de l’Union » , représentant officiel de celle-ci au niveau international.


Par ailleurs, l’AFET suggère d’autres amendements aux traités relatifs :

  • à l’inclusion des menaces hybrides, des campagnes de désinformation et de la coercition économique parmi les causes pouvant déclencher la clause d’assistance mutuelle au profit d’un Etat membre agressé (Art. 42 §7 TUE),

  • à l’ajout du principe d’ « autonome stratégique » parmi les objectifs de base de l’Union en matière de politique étrangère et de défense (art.21 TUE),

  • au financement par le budget de l’UE de certaines dépenses en matière de défense.

Enfin, l’AFET estime que le Parlement devrait être plus étroitement associé aux choix stratégiques de l’Union ainsi qu’à la conclusion et au suivi de ses accords internationaux.



° ° °


Si les propositions ainsi énumérées ne sont pas nouvelles, elles s’inscrivent à présent dans un processus officiellement déclenché de révision des traités (3). Processus inévitablement ardu et incertain, notamment au vu de l’attitude non-coopérative de certains gouvernements en place. Toutefois les circonstances exceptionnelles et sans doute durables causées par l’attitude agressive de la Russie devraient peser en faveur du renforcement des moyens de réaction et de défense de l’Union. La théorie des crises comme facteur déclenchant de réformes au sein de l’Union pourrait - ici aussi - se vérifier.



Jean-Guy Giraud. 07 - 09 - 2022

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(2) Majorité renforcée de 72% des Etats membres (soit 20 Etats sur 27) et de 65% de la population de l’UE 27

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