Déjà au printemps 2022 il était prévisible que la lourdeur du climat social en France affecterait sensiblement le résultat des élections européennes du 9 Juin 2024 et - surtout - aurait des répercussions négatives au niveau de l’UE.
Cette prévision/prédiction était explicitée dans les deux notes ci-joint :
De fait, à la lumière des récents évènements, la situation politique française s’avère aujourd’hui plus instable encore que prévu : dissolution de l’Assemblée nationale dans la foulée du scrutin du 9 Juin 2024 et perspectives très incertaines pour les nouvelles élections législatives des 30 Juin et 7 Juillet 2024.
En conséquence, l’impact européen du désordre politique français pourrait s’avérer plus grave qu’envisagé :
au Parlement européen, les représentants français de tendance modérée et pro-européenne se trouvent affaiblis et, avec eux, les groupes politiques de même tendance. Corrélativement, de nombreux députés français viennent grossir les rangs des groupes eurosceptiques (NB) de la gauche - et, surtout - de la droite extrémistes,
en France, les résultats des scrutins de Juillet 2024 pourraient confirmer une domination de l’Assemblée - et donc du Gouvernement - par l’un ou/et l’autre des partis eurosceptiques. Il en résulterait une ré-orientation plus ou moins drastique de la situation et du rôle français au sein de l’UE : au sein du Conseil où siègent les Ministres - voire même au coeur du Conseil européen où siège le Président. Sans exclure une situation de blocage politique à Paris qui affecterait directement le fonctionnement de ces deux Institutions,
à Bruxelles, plus généralement, la position française sur certains grands dossiers (tels que la réforme de l’UE et son élargissement, la politique étrangère et de défense commune, les politiques économiques et fiscales, l’environnement, le prochain cadre financier pluriannuel, …) rendraient plus difficiles la poursuite des projets ou actions en cours. Indirectement - mais peut-être de façon plus rapide et plus brutale - une détérioration de la situation économique ainsi que des équilibres budgétaires et financiers français impacterait le système monétaire européen.
Ceci dit, la résilience des Institutions européennes devrait permettre - au moins dans un premier temps - d’absorber le « choc français » s’il devait se confirmer.
Le Conseil Européen s’oriente vers un passage en douceur de trois relais stratégiques : les Présidences de la Commission et du Conseil européen lui-même ainsi le poste de Haut Représentant. La reconduction éventuelle de Mme Von Der Leyen est, en soi, un gage de stabilité. À noter toutefois que les votes du PE tant sur la Présidence de la Commission (à la majorité de ses membres) que sur l’ensemble du collège pourraient réserver des surprises au vu de la nouvelle composition de l’Assemblée - même si la majorité de coalition sortante devait être reconduite (1).
Au sein du PE, les orientations divergentes voire contrastées du scrutin des 6/9 Juin 2024 ne modifient pas pour l’instant les équilibres précédents. Il faudra cependant attendre la reconstitution des groupes politiques pour y voir plus clair (notamment à l’extrême droite de l’hémicycle et parmi le groupe important des non inscrits/affiliés)
On a souvent écrit, de façon un peu expéditive, que l’UE était chroniquement « malade de ses États ». Il est de fait exact que des désordres nationaux affectent plus ou moins fréquemment, gravement et durablement la marche du convoi européen. Mais, paradoxalement, le nombre et la diversité croissants des États membres font que des crises isolées et tournantes impactent moins l’ensemble de l’équipe. Il reste cependant à voir si un « protocole commotion » voire un « carton jaune » qui toucheraient un membre de poids de l’équipe EUROPE n’affecteraient pas trop gravement le moral collectif … À l’heure de compétitions internationales particulièrement robustes, un tel handicap serait fâcheux.
Jean-Guy Giraud
17 - 06 - 2024
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NB le terme « eurosceptique » s’entend comme une contestation plus ou moins forte des politiques européennes en cours et/ou du rôle lui-même de l’UE vis à vis des États membres.
(1) voir à et égard les risques de détournements de procédure : https://www.lesamisdutraitedelisbonne.com/post/nomination-de-la-prochaine-commission-risques-et-enjeux
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