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"EUROPE WILL BE FORGED IN CRISIS" - REALLY ?

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    giraudjeanbaptiste0
  • il y a 3 jours
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : il y a 2 jours


Résumé : la crise provoquée par les multiples blocages dont souffre l’Europe devrait être l’occasion d’un nouvel élan réformiste dont l’initiative reviendrait au Conseil européen sous la forme d’un plan d’ensemble et d’un « paquet » de mesures assortis d’un calendrier de mise en oeuvre - comme ce fut le cas pour le marché intérieur et pour l'Euro 


La très ancienne et respectée revue américaine « Foreign Affairs » adresse un important message aux responsables européens (1) :


« Like the crises faced by previous generations of European leaders, the current one, stemming from the chaos of the Trump administration, has the promise to jolt Europe into transformative geopolitical and economic action »


Et elle reprend sur ce thème la très célèbre citation de Jean Monnet (en anglais ..) :


“Europe will be forged in crises, and will be the sum of the solutions adopted for those crises.” 


Ce message rejoint maintes déclarations et analyses émanant de sources européennes. Mais il a un double intérêt particulier : émaner d’une source américaine et rassembler de façon claire et brève la « somme des solutions » - c’est à dire des réformes - que devrait adopter l’Union pour tirer profit de la crise actuelle. 


La liste en est bien connue - jusqu’à ressembler à une sorte de litanie désespérante :


  • investissements coordonnés en matière de défense et de de technologies critiques

  • achèvement de la libération du marché intérieur des biens et services - et notamment du marché des capitaux

  • développement de sa capacité financière - notamment par la voie des emprunts/prêts (Eurobonds)

  • renforcement du rôle international de l’Euro

  • facilitation de sa capacité de décision (vote majoritaire)

  • (…)


Certes, toutes ces questions sont « à l’examen » - parfois depuis de nombreuses années. Mais leur solution progresse à un rythme totalement décalé par rapport au bouleversement de brutal l’environnement politique et économique de l’Europe. « Foreign Affairs » fait d’ailleurs référence aux multiples rapports qui invitent l’Union à accélérer le rythme de ses réformes (Draghi, Letta, Bruegel, Kiel Institute, …).


Bien sûr, « le diable est dans le détail » de chacun des dossiers concernés et on ne peut pas douter de la compétence ni de l’engagement des négociateurs. Mais ceux-ci sont notamment confrontés à la défense de puissants intérêts particuliers (politiques, industriels, professionnels) attachés au statu quo - par exemple dans le domaine du marché des capitaux.


Pour faire prévaloir l’intérêt général, seul un clair, pressant et puissant mandat « ordonné » par l’autorité politique suprême et accompagné d’un délai impératif de réalisation est susceptible de débloquer la situation. Un tel type de mandat avait permis à l’époque la réalisation du marché intérieur et de l’Euro à l’initiative de la Commission Delors.


On pourrait dès lors envisager que le Conseil européen - responsable des « impulsions, orientations et priorités politiques » à donner à l’Union - adresse aux Institutions et aux États membres une invitation formelle à s’entendre sur un « paquet » des principales mesures auxquelles il est fait allusion ci-dessus - et leur fixe un calendrier impératif correspondant par exemple à la fin du mandat de l’actuelle Commission Von der Leyen et du Parlement européen - soit au printemps 2029. Cette « invitation » ne nécessiterait pas l’accord unanime des 27 membres du Conseil mais pourrait être lancée par un large consensus d’une forte majorité d’entr’eux. La Commission devrait prendre le même engagement et serait principalement chargée de la réalisation de ce plan. Le Parlement, pour sa part, accueillerait très favorablement une telle initiative et lui fournirait son appui politique et législatif. 


Parallèlement, la question tout aussi brûlante mais beaucoup plus fondamentale de la création d’une défense européenne au sens de l’article 42§2 TUE pourrait être sérieusement abordée dans ce même laps de temps. Un accord de principe pourrait être envisagé sur la base duquel une série d’étapes - étalées sur une période plus longue - seraient précisément fixées.


La simultanéité et la combinaison des menaces crées par l’expansionnisme guerrier de la Russie poutinienne, le désengagement doublé d’hostilité vis à vis de l’UE de l’Amérique trumpienne, la remise en cause des fondamentaux de l’intégration européenne par les courants d’extrême droite en Europe même sont autant de facteurs d’une crise que l’on peut qualifier de majeure et d’imminente.


« Never waste a good crisis » : cette maxime anglo-saxonne invitant à tirer profit des circonstances pour accélérer des réformes en souffrance - mais pourtant indispensables - trouverait ici une application particulièrement opportune.



« Une chance formidable s’offre à l’Europe. Encore faudrait-il la saisir » .

Dans un récent article de Libération, Jacques Attali (3) adresse un avertissement tout aussi direct sur les conséquences d’un blocage de l’UE : 

 

« Dans vingt ans, on dira sans doute que c’est en 2025 que l’Europe a pris sa chance, ou l’a manquée, de redevenir un acteur majeur de l’Histoire mondiale, et d’abord de rester maître de son propre destin, de rester libre. » 


Il insiste sur la nécessité de stopper son déclin industriel et regrette qu’en dépit « d’innombrables discours et rapports , dont celui de Mario Draghi, « rien n’est fait ». Il constate que « personne, ni à la Commission, ni au Conseil des ministres, depuis sa parution il y a neuf mois, n’a pris le temps de le transformer en une liste de directives détaillées, à faire présenter au Conseil par les directions compétentes de la Commission. » 

 

Et il met en cause le fait que « les résistances de l’ancien monde, en Europe et ailleurs, qui se satisfont d’une situation où chacun est maître dans son petit royaume ».  

 

D’autre part, il est plus sévère encore vis à vis de la politique étrangère de l’UE (Ukraine, Groenland, Afrique, Moyen Orient) et met en cause violemment les « l’incurie des responsables européens » et en particulier «  l’invisibilité hallucinante du président du Conseil Européen (4) - l’incompétence abyssale du vice-président exécutif de la commission chargé de la Prospérité et de la Stratégie industrielle - « la volonté impériale de la Présidente de la Commission de tout contrôler, d’éteindre toute initiative qui ne parte pas d’elle » et , surtout, « l’absence de prise de conscience par les dirigeants nationaux, et par les peuples européens de l’urgence extrême de la situation » .

 

Et de conclure : « Nous pouvons rester les maîtres de notre destin. Nous pouvons redevenir un acteur majeur de l’Histoire. Une chance formidable s’offre à l’Europe. Encore faudrait-il la saisir » .

 

 

Jean-Guy Giraud

30 - 05 - 2025

 

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(4) Le Président est notamment responsable de l’ordre du jour des réunions du Conseil Européen

 

 
 
 

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