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BREXIT : UN NO DEAL POUR UNE “GLOBAL BRITAIN” ?



Les partisans britanniques du No Deal affichent de plus en plus ouvertement les raisons de leur position : ils souhaitent être immédiatement et totalement libérés du “carcan” européen et récupérer ainsi une complète liberté de manoeuvre pour négocier ultérieurement un accord commercial ou d’association avec l’UE. Ils refusent par là même toute période de transition et toute règle pré-établie qui devrait faire partie d’un futur accord.


La nature et durée de la période de transition


L’accord de retrait du RU de l’UE (le “Deal”) prévoit logiquement une période de transition entre le moment où le RU cessera formellement de faire partie de l'UE et celui où entrera en vigueur un nouvel accord “sur les futures relations” (cad un accord commercial ou d’association) entre les deux parties.


Cette transition vise à organiser un retrait ordonné provoquant le moins de perturbations possibles pour les citoyens comme pour les entreprises des deux parties.


Les règles fixant les modalités de cette période de transition font partie intégrante de l’accord de retrait lui-même (articles 126 à 132) (1).


La durée fixée initialement pour cette période est relativement courte puisqu’elle doit en principe s’achever au 31 Décembre 2020. Si le Deal devait finalement être confirmé par le RU au 31 Octobre 2019 (dernier délai concédé par l’UE), cela ne laisserait que 14 mois pour la négociation et la ratification d’un nouvel accord entre les deux parties (accord commercial ou d’association).  L’article 132 du Deal prévoit toutefois la possibilité de prolonger la période de transition de deux ans au maximum soit jusqu’au 31 Décembre 2022. L’idée de base est que le nouvel accord sur les relations futures puisse s’appliquer “dans la mesure du possible, à compter de la fin de la période de transition” - afin d’éviter toute solution de continuité et tout vide juridique. Toutefois, il sera sans doute possible de prolonger la période de transition si nécessaire, ce qui apparait comme probable.  Les contraintes attachées à cette période En essence, cette période de transition impose au RU des conditions strictes puisque celui-ci : 

  • demeure tenu d’appliquer le droit de l’Union (y compris le nouveau droit adopté pendant cette période) ainsi que le contrôle de son application par la Commission et la CJE,

  • mais n’est plus représenté dans les Institutions et ne participe donc plus aux débats et décisions de celles-ci. 

On peut concevoir qu’une telle situation (même provisoire) apparaisse comme particulièrement contraignante - tant sur le plan pratique que politique - pour les partisans du Brexit. Et même franchement détestable pour les plus extrémistes d’entre eux - d’autant plus que l’accord de sortie contient des clauses qui s’imposeront au RU même après la fin de la période de transition et feront donc ipso facto partie du nouvel accord sur les relations futures (notamment quant aux personnes résidentes et à la frontière irlandaise). Les motivations politiques du No Deal ... C’est à l’évidence pour éviter une telle situation durable de contrainte et de dépendance que certains partisans du Brexit s’opposent au Deal et préfèrent une rupture totale (No Deal) des liens juridiques entre l’UE et le RU dès la fin du délai prévu par l’article 50 - cad dès le 1er Novembre 2019 (sauf nouvelle prolongation).  Ils ne renoncent sans doute pas à négocier ultérieurement un accord commercial ou d’association UE/UK - mais ils souhaitent le faire “without strings attached”, cad avec une totale autonomie et une complète marge de manoeuvre sur le fond et dans le temps.  En attendant l’entrée en vigueur de ce futur accord (dont la négociation sera sans doute longue et difficile), toutes les règles actuellement applicables régissant tous les domaines des relations UE/UK cesseraient de s’appliquer, créant ainsi un vide juridique subit et complet que les dispositions générales du droit international auraient beaucoup de mal à combler.  Une situation exceptionnelle dans la mesure où les relations entre l’UE et la quasi totalité de ses partenaires internationaux sont à l’heure actuelle régies par des accords bi-latéraux spécifiques.  … et les motivations politiciennes Pour les hard-brexiteers menés par le Premier Ministre Boris Johnson, il est sans doute inconcevable et inacceptable que, durant les 3 à 5 prochaines années, le RU (qu’ils espèrent continuer à diriger pendant cette période) demeure encombré par la question européenne : situation de dépendance pendant la période transitoire puis contraintes liées à la négociation d’un nouvel accord.  Tant leur vision du rôle géo-politique que doit retrouver le RU ("Global/Glorious Britain”) que leur inclinaison vers une libéralisation économique extensive (“Singapour model”) ne peuvent s’accommoder de telles attaches. Cette option intransigeante du “grand large” était sans doute présente - depuis le début - dans l’esprit et les plans du groupe de conservateurs à l’origine du premier referendum sur le Brexit (2).  Ce “complot” - assorti de “coups” constitutionnels - rencontre en ce moment même une résistance forte - même si désordonnée - au sein du Parlement comme de l’opinion. On saura dans les tous prochains jours quel parti l’emportera. Nous avons souvent estimé ici (3) que seul un nouveau referendum pouvait nettement et durablement trancher ce noeud gordien dans un sens ou dans l’autre. Il semble que le RU s’oriente plutôt vers de nouvelles élections qui risquent fort - notamment du fait des modalités de scrutin - de ne pas résoudre clairement la question et de provoquer le pire des résultats : un No Deal par défaut.

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