top of page
Rechercher

UN CONSEIL EUROPÉEN À LA DÉRIVE ?


À la veille de la réunion du Conseil européen du 13/12/19, l’excellent service de recherche du PE met en ligne un tableau et une note sur la composition actuelle de cette Institution (1).

Une grande volatilité Cette note souligne de façon factuelle la grande volatilité de cette composition. Celle-ci dépendant directement et automatiquement des élections ou des remaniements intervenus dans chacun des 28 États membres, il apparait que, pendant la période 2015/2019, la composition du Conseil européen a été modifiée en moyenne tous les 2,2 mois.

Autant dire que, pendant cette période, le Conseil européen ne s’est pratiquement jamais réuni deux fois dans la même composition.

Plus précisément, dans le Conseil européen qui se réunira le 13 décembre :

  • 2 membres y participeront pour la première fois (2)(3),

  • 8 autres membres y siègent depuis moins d’un an,

  • 4 autres membres y siègent depuis moins de deux ans

D’autre part, 3 membres siègeront en tant “caretakers” cad en tant que chefs d’un gouvernement minoritaire “en charge des affaires courantes”. Et 2 membres au moins sont dans une situation très instable à l’intérieur de leurs pays respectifs.

La volatilité-par-nature de cette Institution jette quelque doute sur sa capacité à donner, de façon informée et continue, “les impulsions nécessaires au fonctionnement de l’Union et à en définir les orientations générales” (art.15§1 TUE) - et ce d’autant plus que chacun de ses membres dispose d’un droit de veto sur les principales décisions.

Ajoutons que, pour la plupart des membres, la gestion des affaires nationales occupe légitimement l’essentiel de leur temps et constitue leur principale préoccupation - les questions européennes ne les concernant que de façon subsidiaire et épisodique.

Auto-saisines et …auto-blocages Cette situation pour le moins bancale est aggravée par le fait que, depuis sa création en 1979 et son officialisation par les traités de Maastricht puis de Lisbonne, le Conseil européen n’a cessé d’élargir le champ de ses compétences et d’étendre l’ampleur des questions qu’il évoque. Il est ainsi devenu une sorte d’instance d’appel de nombreuses décisions que les traités confient, en principe, au Conseil de ministres et au Parlement européen - voire à la Commission.

Parmi les compétences qui lui sont formellement attribuées figure l’adoption - jusque dans ses moindres détails - du cadre financier pluriannuel (CFP) 2021/2027 - qui figurera à l’ordre du jour de sa séance du 13 Décembre 2019. Il s’agit d’un document hautement technique dont l’adoption exige, au surplus, le vote unanime de tous les membres. Il est difficile d’imaginer de situation plus ambigüe - du moins si l’on se réfère aux principes de base du fonctionnement d’une organisation internationale ou, plus encore, fédérale.


Il est vrai que, à son origine en 1979, la création du Conseil européen a été conçue pour "faire pendant" à l’élection du Parlement européen au suffrage universel direct. Une sorte d’”équilibrage" entre le pouvoir gouvernemental et national de chaque État et le pouvoir démocratique et collectif européen.

Déjà contestable quant à ces principes, cet équilibrage est devenu un facteur de blocage lorsque "le nombre et la diversité" croissants des États membres ont progressivement altéré l’esprit d’unité et de solidarité entre les Gouvernements de l’Union.

Une question fondamentale sur laquelle la future “Conférence sur l’avenir de l’Union” devrait se pencher en priorité.


Jean-Guy Giraud  11 - 12 - 2019  __________________________ 

(1) https://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/ATAG/2018/608781/EPRS_ATA(2018)608781_EN.pdf (2) dont la Première Ministre de Finlande en charge depuis une semaine et dont le Gouvernement assure actuellement la présidence tournante du Conseil de Ministres. (3) à noter que les nouveaux Présidents du Conseil européen et de la Commission participeront aussi - pour la première fois - à cette réunion. Leur situation est cependant différente dans la mesure où ils ne représentent pas un État et ne participent pas au vote. D’autre part, la Présidente de la Commission s’exprime au nom d’un collège indépendant.    

Comments


bottom of page