LES TROUS BÉANTS DE "L'UNION DOUANIÈRE" EUROPÉENNE
- giraudjeanbaptiste0
- 29 août
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Les récentes et explosives négociations tarifaires entre l’UE et les USA (non encore finalisées et sécurisées à ce jour) ont mis en évidence l’importance stratégique de l’existence d’une Union Douanière et d’un Marché Intérieur communs aux 27 États membres.
Toutefois, derrière ces concepts juridiques, se cache une réalité préoccupante : dans quelle mesure cette Union Douanière - au delà des seuls aspects tarifaires - est-elle réellement en mesure de jouer son rôle de gestion, surveillance et contrôle des importations et de leur mise sur le marché des 27 ?
Dans une récente note - liée au projet d’accord commercial UE - Mercosur (1) - nous mettions en évidence les disparités et les faiblesses de ce contrôle dont la responsabilité est déléguée aux autorités nationales. Nous constations que - loin d’avoir établi une « frontière commune » à l’ensemble de la zone européenne - il existait plutôt « 27 frontières nationales » dont la gestion et les capacités de contrôle variaient considérablement selon les États membres.
Au total, il apparaissait que l'l’Union douanière de l’UE 27 avait pris un retard considérable face à l’accroissement exponentiel des échanges, l’imposition de nouvelles normes non-tarifaires, l’irruption de l’e-commerce, etc…
Les conséquences pratiques de cette situation viennent d’être explicitées par un récent rapport de la Commission (2) mettant en évidence la faiblesse des contrôles douaniers nationaux sur la conformité des produits importés aux normes européennes de qualité, sécurité, environnement, etc ... En résumé, pour 2024 :
une infime quantité des produits importés sont effectivement contrôlés : 0,0082% (!) soit 82 produits sur 1 million livrés à la libre circulation dans l’UE
sur ces 82 contrôles (toujours sur 1 million), seulement 51 ont donné lieu à des suspensions et 13 à des interdictions d’accès sur le marché européen.
de considérables différence (« huge discrepancies ») de performance dans le contrôle existent entre les États membres : une douzaine sont qualifiés d’insuffisantes et deux de « clearly under performing ».
On voit ainsi les problèmes que posent ces carences douanières nationales pour « the protection of EU consumers, the environment and EU business ». Au passage le rapport relève que la Chine est de loin le principal fournisseurs des produits concernés.
Et il rappelle opportunément que la Commission a proposé en Mai 2023 une ambitieuse réforme de l’Union douanière (3) visant à renforcer et harmoniser les contrôles sous la houlette centralisée d’une Autorité Douanière Européenne. Un des aspects les plus prometteurs de cette réforme serait la création d’un registre informatisé unique commun au 27 États membres permettant de tracer en temps réel les flux d’importation et l’exécution des contrôles. Cette proposition a fait l’objet d’un vote positif du PE et se trouve à présent sur la table du Conseil où il ne manquera pas de froisser quelques susceptibilités et de déranger certaines pratiques.
Relevons à cet égard plusieurs faiblesses significatives du dispositif envisagé : l’autonomie des services douaniers nationaux n’est pas mise en question, certaines réformes demeurent facultatives (comme la participation au registre informatisé central), les performances relatives des différents États membres ne sont pas révélées et identifiées par la Commission, ...
Sur un plan plus « politique » on peut toutefois se réjouir que la Commission reconnaisse (tardivement ?) que sa responsabilité en matière de commerce international ne se limite pas à la négociation - très médiatique - d’ambitieux accords internationaux. Et qu’elle se considère aussi responsable de l’application effective de leurs clauses aux frontières de l’UE, notamment de celles qui protègent les consommateurs (et les producteurs) européens.
Pour rappel, c’est dès ... 1789 que fut créée l’ "United States Customs Service" - plus tard transformée en l’ "United States Customs and Border Protection ». Les pères fondateurs américains étaient à l’évidence plus préoccupés d’efficacité que de « subsidiarité »…
Jean-Guy Giraud
29 - 08 - 2025
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