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« LE JARDIN ET LA JUNGLE » : LE MAUVAIS PROCÈS FAIT À JOSEP BORRELL



De façon assez inattendue, l’excellent discours de Josep Borrell devant l’Académie Diplomatique Européenne à Bruges (11/10/22) (1) a suscité une mini-polémique dans certains organes de presse (2) et certains milieux politiques marginaux.


La querelle semble être d’ordre sémantique : elle est centrée sur les termes utilisés par par Josep Borrell pour distinguer « le jardin européen » de « la jungle du reste du monde ».


Voici le passage concerné :


"Here, Bruges is a good example of the European garden. Yes, Europe is a garden. We have built a garden. Everything works. It is the best combination of political freedom, economic prosperity and social cohesion that the humankind has been able to build - the three things together. And here, Bruges is maybe a good representation of beautiful things, intellectual life, wellbeing. The rest of the world – and you know this very well, Federica – is not exactly a garden. Most of the rest of the world is a jungle, and the jungle could invade the garden. The gardeners should take care of it, but they will not protect the garden by building walls. A nice small garden surrounded by high walls in order to prevent the jungle from coming in is not going to be a solution. Because the jungle has a strong growth capacity, and the wall will never be high enough in order to protect the garden. The gardeners have to go to the jungle. Europeans have to be much more engaged with the rest of the world. Otherwise, the rest of the world will invade us, by different ways and means. »

On voit très clairement le mauvais procès fait à ce texte.

« La jungle », dans ce contexte, ce sont tous les pays hors de l’Europe qui souffrent soit de sous-développement économique soit de régimes dictatoriaux et impérialistes soit de désordres politiques ou sociaux chroniques. C’est à dire, en effet, une bonne partie du monde contemporain …

« Le jardin », c’est l’Union européenne qui a réussi à bâtir un ordre et un système qui favorisent la croissance, la démocratie et la paix.



Et, de cette opposition volontairement schématique, Josep Borrel tire une conclusion claire et dynamique : « les jardiniers doivent aller vers la jungle ». C’est à dire : l’Europe ne doit pas rester abritée derrière ses murs mais au contraire s’engager dans le monde - non seulement pour préserver son propre modèle de civilisation mais aussi pour participer activement aux efforts de pacification, de développement et de progrès démocratique autour d’elle.


Par cette déclaration, Josep Borrell encourage les futurs diplomates européens destinés à être postés « dans la jungle » - auxquels il s’adresse ici de façon spécifique - à s’engager plus activement dans cette mission : « your duty will not be to take care of the garden itself but of the jungle outside ».


Josep Borrell est un diplomate engagé, un homme de caractère et de franc-parler. Dans sa situation délicate de « Haut Représentant » d‘une Union de 27 Etats souvent divisés, il fait preuve d’un volontarisme et d’un dynamisme exceptionnels. Dans les circonstances dramatiques sans précédent de la crise ukrainienne, il a jusqu’ici réussi à préserver l’unité de l’UE face à la Russie (bien représentative de « la jungle ») et à lui faire jouer un rôle déterminant tant sur le plan militaire que diplomatique.


Au sein de la Commission Van der Leyen, Josep Borrell est l’un des membres les plus exposés mais aussi des plus actifs. Cet ancien Président du Parlement européen et Ministre des Affaires étrangères d’Espagne déroute parfois le monde diplomatique et les medias par son style direct et ses improvisations. Mais, sous sa direction, le « Ministère des Affaires étrangères de l’UE » (3) a pris toute sa place dans les cénacles, les débats et le traitement des conflits internationaux. Il est un des acteurs les plus efficaces d’une « Commission géo-politique » au service de la « souveraineté européenne » .



Jean-Guy Giraud. 18 - 10 - 2022

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(3) l’appellation officielle, bureaucratique et réductrice de « Service Européen d’Action extérieure » ne correspond pas - plus - à la réalité des choses

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