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L'UE FACE À LA DÉRIVE DU SYSTÈME DÉMOCRATIQUE AMÉRICAIN 

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    giraudjeanbaptiste0
  • 6 oct.
  • 5 min de lecture
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La dérive de la démocratie américaine contamine l’UE. Il incombe à ses Institutions de stimuler et coordonner la résistance de ses États membres

L’extraordinaire dérive du césarisme nationaliste et ploutocratique trumpien produit deseffets délétères sur l’ensemble du monde occidental et plus particulièrement sur son principal allié et partenaire, l’Union européenne et ses États membres.


On sait que le Président américain considère par principe l’UE comme une organisation à la fois néfaste, illégitime et nuisible aux intérêts américains - ainsi d’ailleurs que toutes les grandes instances internationales sous l’égide des Nations unies. Cette hostilité se manifeste de plus en plus ouvertement sur les plans géopolitique, commercial, industriel, digital et, demain sans doute, financier et monétaire. On sait aussi que la seule façon pour l’Europe de résister à cette agressivité est de renforcer son unité et d’organiser sa résistance avec rapidité et détermination.



Une menace idéologique ...

Mais il convient de prendre aussi toute la mesure de la révolution politique, idéologique et culturelle sans précédent qui sévit au sein même des États Unis - et peut-être d’en tirer quelque leçons pour l’Union et ses États membres. Le dé-construction systématique des mécanismes et des appareils constitutionnels et administratifs au profit du pouvoir présidentiel américains est bien documentée parce que la plus spectaculaire. Plus profondément, un autre phénomène de caractère sociétal est moins clairement perçu de l’extérieur : la mise sous tutelle progressive de l’opinion, d’abord collective et bientôt individuelle. Une sorte de processus de type Orwellien transplanté contre-intuitivement outre atlantique, un « 1984 à l’américaine » en quelque sorte.


Cette observation, qui paraissait encore excessive il y a peu, ne peut plus à présent être ignorée. Sur les réseaux digitaux et les grands plateaux audiovisuels contrôlés par une poignée de grands groupes liés au Président, toute opinion dissidente de la doxa trumpienne est « criminalisée »  et la peur du « châtiment » provoque « une réaction, regrettable mais naturelle, d’auto-censure ». Un article du New York Times du 1er Octobre 2025 fournit la plus récente description, détaillée et documentée, de ce phénomène : nous en donnons en foot note quelques extraits frappants (1).



… qui traverse l’Atlantique ... 

Mais en quoi l’UE devrait-elle être concernée par cette dégradation de l’État de droit aux USA?


Tout d’abord du fait de la transmission/propagation/contagion naturelles outre-atlantique (et au-delà) des courants sociaux-politiques et idéologiques américains - à travers les réseaux digitaux et médiatiques sous l’influence de la classe au pouvoir à Washington. 



… met l’UE à l’épreuve …

Mais aussi du fait de la faiblesse - relative - des mécanismes de défense de l’État de droit au niveau de l’UE. Certes, une liste impressionnante de règles et d’organes chargés de cette défense peut être dressée mais il faudrait aussi en souligner schématiquement les limites:


  • article 7 TUE (violation persistante des « valeurs »  de l’Union) : ce mécanisme est resté lettre morte depuis l’origine faute d’unanimité pour le déclancher - de sorte que son caractère dissuasif demeure incertain,

  • Cour de Justice européenne : elle peut condamner la violation de certaines dispositions relatives aux « valeurs » - mais les conditions sont strictes et la procédure lente et exigeante,

  • Charte des Droits Fondamentaux : elle dresse un catalogue très étendu de ces droits - mais elle est censée ne s’appliquer qu’aux actes de l’Union elle-même (cad de ses Institutions). Ce n’est que par une analogie non contraignante que ses dispositions peuvent concerner les actes des États membres,

  • conditionnalité budgétaire : les financements de l’Union au profit des États membres peuvent être suspendus en cas de violations de l’État de droit - mais celles-ci doivent avoir un lien direct avec l’utilisation des fonds européens,

  • surveillance : une Agence des Droits fondamentaux est chargée d’observer le respect de ces droits par les États membres et de dresser des rapports périodiques - mais elle ne dispose pas de pouvoirs contraignants,



… et chacun de ses États membres.

Au total, on voit que - si une dérive préjudiciable à l’État de droit du fait du gouvernement (Institutions) de l’Union elle même ne semble guère concevable - il n’en est pas ainsi pour ses États membres - comme l’ont montré des évolutions et des expériences récentes par exemple en Hongrie, Slovaquie, République tchèque... Au surplus, il faut noter au passage un certain paradoxe propre au système européen : le même État membre peut à la fois violer impunément l’État de droit et bloquer les mécanismes de défense européens …


Autrement dit, les États membres de l’UE ne sont pas à l’abri d’une « contamination trumpienne »  avec pour caractéristiques : le nationalisme souverainiste (et donc la remise cause du processus d’intégration européenne) -  la domination du régime politique par le pouvoir exécutif - le culte du chef - la déconstruction de l’État - l’affairisme entrainant conflits d’intérêt et corruption … ainsi que, comme développé ici, la remise en cause de l’État de droit et des libertés individuelles.


On retrouve en effet la plupart de ces dérives dans la doctrine et les programmes des partis d’extrême droite dont l’audience progresse fortement dans une demi douzaine d’États membres, facilitée par l’affaiblissement des partis modérés (dits "de gouvernement ») à gauche comme à droite. Ici aussi, le parallèle avec l’effacement du Parti Démocrate américain peut être souligné.



Les Institutions doivent impulser et coordonner la résistance

L’UE se trouve en quelque sorte au pied du mur. Depuis son origine - et en raison des antécédents historiques qui ont précédé sa création - elle a prôné et protégé la défense du régime parlementaire et démocratique, basé sur la protection des droits individuels et collectifs et la promotion de certaines « valeurs ». Elle se trouve aujourd’hui quasiment assiégée par de grandes puissances fondées sur des principes inverses (Russie, Chine, …) et doit faire face au risque de défection brutale du camp démocratique de la part de son ancienne alliée américaine.


La résistance européenne doit et peut être coordonnée par les Institutions communes, cad par « Bruxelles ». Même si, en fin de compte, c’est au sein de chaque État membre que se déroule le débat politique et social - et que se prennent les décisions. Les adversaires ou « faux amis » de l’Union en sont bien conscients qui concentrent leur pression ou leur influence sur les différentes capitales.


Menacée sur les plans sécuritaire et économique, isolée dans plusieurs de ses combats (ordre international, environnement, …) l’Union doit à présent défendre son idéal démocratique. La principale responsabilité en incombe à chacun des États membres mais les Institutions communes doivent donner les impulsions, renforcer les moyens et assurer la coordination de l’effort commun de résistance.


C’est précisément pour assurer ce rôle qu’elles ont été créées. 



Jean-Guy Giraud 

03 - 09 - 2025

_______________________


   

 Extraits :  

  • « Whether you want to call it authoritarianism or not, the president is criminalizing dissent

  • The president of the United States said that he believes critical stories about him are “illegal.”

  • That threat has been chilling speech on campuses for years. Now it’s coming for all of you

  • Create chaos at all costs. Confuse people about whether the sky is blue or the grass is green 

  • Every good-faith questioner is now a dissenter. You either open yourself up to harassment or, like most people, you choose silence. And if silence is the only logical choice, then authoritarianism has arrived.

  • The president of the United States has both direct coercive power of the state and, by and large, indirect power over communication institutions

  • The merging of state power and economic power around one man who accepts that power as his due »  


 
 
 

1 commentaire


Ilibéris Jurado
Ilibéris Jurado
11 oct.

Mme Von der Leyen ayant accepté les exigences du président étasunien sans mandat des États européens, la dérive trumpiste est entrée au cœur de l’Union.

Concernant ce qui est rappelé dans cette analyse : « Au total, on voit que - si une dérive préjudiciable à l’État de droit du fait du gouvernement (Institutions) de l’Union elle même ne semble guère concevable - il n’en est pas ainsi pour ses États membres - comme l’ont montré des évolutions et des expériences récentes par exemple en Hongrie, Slovaquie, République tchèque... », les points de suspension auraient dû se trouver après avoir cité la France qui subit également une dérive préjudiciable à l’État de droit depuis les élections législatives de 2024 après la…

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