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BREXIT : LE REFERENDUM, LES MILLIONNAIRES ET LES HEDGE FUNDS



Décidément, le referendum sur le Brexit du 23 Juin 2016 a agi comme un révélateur du dévoiement de certaines pratiques de vote britanniques.


C’est - curieusement - la presse américaine qui s’’est fait récemment l’écho de deux “affaires” déjà connues mais qui viennent de faire l’objet d’enquêtes détaillées du New York Times et du Bloomberg Businessweek.


Un financement russe par M. Aaron Banks interposé ? 

La première affaire - analysée par le NYT du 29 Juin 2018 - concerne le financement de la campagne des partisans du “Leave” et plus particulièrement le cas de son “donateur” principal, M. Aaron Banks (1) - voir note ci-dessous du 21/10/17.


Celui ci y aurait contribué pour une somme comprise entre … 8 et 16 millions de Livres sterling. Tant l’origine de ces fonds que la motivation réelle de la “donation” sont examinées par l’enquête du NYT. En résumé, il apparaitrait d’une part que ces sommes aurait en fait été “prêtées" par le milliardaire (dont la trésorerie réelle ne semble pas en réalité à la hauteur de telles sommes) - et que le véritable commanditaire du financement serait étroitement lié … aux autorités russes.


En résumé, M.Aaron Banks aurait - en échange de son intermédiation dans la donation - obtenu d’être associé à des opérations financières relatives à la prise de contrôle de diverses ressources minières placées sous le contrôle direct ou indirect du gouvernement russe.


Au total, ce serait donc ce gouvernement qui aurait - par M. Aaron Banks interposé - financé une grande partie de la campagne du camp pro-Brexit lors du referendum.


Cette affaire faisait déjà l’objet d’investigations au RU de la part de la Commission électorale et au sein du Parlement - mais les révélations du NYT vont certainement les relancer.


Rappelons au passage que c’est le laxisme de la législation britannique en matière de réglementation du financement des campagnes électorales et référendaires qui permet le développement de tels abus. Et que la commission électorale chargée du contrôle de ce financement apparait totalement démunie pour jouer ce rôle.


Une collusion entre sondeurs et fonds d’investissement ?

La deuxième affaire - révélée par le Bloomberg Businessweek du 23 Juin 2018 - est d’une nature différente et ne constitue pas, à proprement parler, une interférence politique dans le déroulement de la campagne (2).


Le BB a enquêté sur la façon dont “les Hedge Funds ont fait des millions en utilisant des sondages privés” relatifs aux résultats du referendum.


En résumé, BB explique comment ces Fonds ont fait effectuer pour leur compte privé des sondages confidentiels dans les heures (voire les minutes) qui ont immédiatement précédé ou suivi la clôture du scrutin. Ainsi informés à l’avance sur ces résultats, ils ont pu manipuler les marchés - notamment en anticipant la forte baisse de la Livre qui a suivi l’annonce plus tardive du score final cad de la victoire du vote pro-Brexit.


Cette enquête met en relief les relations incestueuses entre les organismes de sondage et certains fonds d’investissements spécialisés dans les opérations spéculatives “éclair”. Elle explique notamment que ces instituts auraient quelque peu manipulé les sondages publics en laissant croire jusqu’au dernier moment à une possible défaite du vote “Leave” - alors qu’ils étaient informés secrètement d’un probable résultat inverse.


Au passage, le BB note que Nigel Farage - chef de file de la campagne pour le “Leave” et ancien “broker" - a lui-même curieusement et publiquement annoncé cette fausse défaite "dans les secondes qui ont précédé la clôture du scrutin”.


Au total, “des milliards de dollars” transitèrent en quelques heures sur les marchés liés à la devise britannique anticipant le “plongeon historique" de la Livre qui chuta effectivement de 1.50 à 1.32 dollars (soit 12%) dans la nuit du 23 Juin 2018. Bien que difficiles à estimer, les gains nets ainsi réalisés par les Hedge Funds se chiffreraient à plusieurs centaines de millions de dollars.


Ici encore, le BB relève le laxisme de la législation britannique sur la publication de sondages immédiatement avant - ou durant - les votes. Il semblerait en effet que cette règle ne s’appliquerait pas aux sondages “privés” cad réservés à des commanditaires particuliers …


Les journaux américains qui ont effectué ces enquêtes sont bien placés pour apprécier ce type de pratiques et particulièrement sensibilisés à de supposées interférences russes dans certains scrutins étrangers…


Il reste à voir comment la presse, l’opinion et les autorités britanniques réagiront - ou non - à ce type de dysfonctionnements qui ternit quelque peu la réputation d’une des “ plus vieilles démocraties du monde”. Et quelles réformes ou leçons pourraient - ou non - en être tirées.


En attendant, certains déploreront que, le 23 Juin 2017, ce soit l’Union européenne qui en ait été bien involontairement le cadre et, dans une certaine mesure, la victime.



Jean-Guy Giraud  03 - 07 - 2018


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