
La "manifestation-monstre” AntiBrexit du 23 Mars 2019 à Londres aura au moins atteint deux objectifs :
ôter au Gouvernement May et au parti Conservateur le contrôle exclusif du processus interne de décision pour renforcer le rôle du Parlement,
démontrer la capacité de la société britannique (ou du moins d’une partie d’entre elle) à manifester dans le calme et avec humour (1) son irritation légitime.
Pour les pro-européens des autres États membres de l’UE, cet acte de foi populaire vis à vis de l’Union est également un signal positif à la veille des élections.
Mais ce énième revirement du processus du Brexit est aussi une preuve de la situation exceptionnelle de crise politique et constitutionnelle que traverse le RU.
Crise dont il n’est pas certain que le Parlement puisse effectivement sortir le pays sans qu’il soit procédé - rapidement - à un exercice de clarification démocratique par voie d’élections et/ou de referendum.
Même si la patience de l’UE est mise à rude épreuve depuis plus de deux ans, l’incertitude persistante de l’issue finale devrait l’inciter à ne pas brusquer les choses.
L’enjeu est en effet considérable : le RU va-t-il s’écarter du bloc européen pour devenir une sorte d’électron libre politique et économique aux franges du continent ? L’UE va-t-elle perdre sa principale puissance militaire, financière et commerciale ainsi que - plus gravement encore - un de ses principaux ancrages dans le système démocratique et libéral ?
Il est utile enfin, à ce stade ultime du processus, de se souvenir comment toute l’affaire - qui a parfois été qualifiée de véritable “complot” - a démarré sous la conduite de l’aile droite des Tories et de la branche la plus réactionnaire de l’Establishment.
La confusion que les Brexiteers ont réussi à créer dans ce processus est à présent clairement perçue par l’opinion. Le 23 Mars, en envahissant pacifiquement Londres, les manifestants ont peut- être reconquis dans la rue le chemin des urnes.
Jean-Guy Giraud 26 - 03 - 2019