À l’occasion de la rédaction des textes relatifs à l’accord de retrait du RU de l’UE, l’Espagne a été amenée - assez tardivement - à soulever la question de Gibraltar.
Cette question revêt au moins trois aspects distincts - bien que potentiellement liés :
1. le maintien de la souveraineté britannique sur cette minuscule partie de la péninsule ibérique,
2. l’impact de la sortie de Gibraltar (ensemble avec le RU) du marché intérieur européen,
3. la pérennité de la situation de "paradis fiscal" de ce territoire britannique.
La première question - très ancienne - est de caractère diplomatique et bilatéral, du seul ressort des deux États concernés : l’Espagne et le RU. Elle n’est pas directement liée au Brexit mais le Gouvernement espagnol craint que l’une ou l’autre disposition de l’accord de retrait ou du futur accord d’association ne modifie indirectement le statu quo actuel et n'affaiblisse ses revendications territoriales sur Gibraltar.
La deuxième question est au contraire directement liée au Brexit : en quittant l’UE à la suite du RU, le Gibraltar perd les avantages de la libre circulation des personnes, marchandises et services avec les États membres de l’UE. Il en résulterait de graves conséquences sur son modèle économique très particulier basé sur certains services tels que la banque, l’assurance et les jeux en ligne qui représentent plus de 50% du PIB.
La troisième question est la plus controversée : Gibraltar est généralement considéré comme un "paradis fiscal" (1) du fait de l’absence de TVA, d’un faible taux de l’impôt sur les sociétés et d’une faible transparence des activités financières. De fait, son régime fiscal attire un nombre considérable de domiciliations de sociétés : près de 18.000 pour 30.000 habitants. D’autre part, il abrite un “hub” important de contrebande d’alcool et de tabac.
Ainsi, Gibraltar constitue un des maillons du réseau de paradis fiscaux liés au RU, maillon de taille relativement modeste mais géographiquement proche de l’Union.(2)
À ce titre, son cas devrait être examiné - avec celui des autres Overseas Territories britanniques - dans le cadre des négociations sur le futur accord d’association UE/RU (3).
JGG 24/11/18
(1) la plupart des ONG incluent Gibraltar dans la liste des "paradis fiscaux” - à la différence de l’OCDE (qui tient compte de la volonté “coopérative" des États concernés) et de la Commission (qui exclut … les États membres de l’UE)
(2) voir aussi : https://www.lesamisdutraitedelisbonne.com/post-unique/2018/11/21/LE-BREXIT-ET-LES-PARADIS-FISCAUX-BRITANNIQUES
(3) “The EU should use the opportunity of Brexit to blacklist the UK overseas territories and force the government to end their poisonous tax secrecy (…) The EU needs to be clear that it will not sign a free trade agreement with the UK until its cleans up its act on tax.” - Mrs Scott Cato, MEP britannique membre de la Commission d’enquête “PANAM"