L' affaire du Brexit a été l’occasion de mettre en lumière maints dysfonctionnements du système politique britannique.
Parmi ceux-ci, certaines caractéristiques de la classe politique anglaise ont été mises en évidence.
Un récent article de la revue The Spectator (1) vise à démontrer que le pays "a fini par être dirigé par des opportunistes éloquents” :
“How Britain ended up being run by eloquent chancers” .
Les auteurs s’attachent à montrer que cette classe politique (qualifiée de “British bluffocracy”) est devenue experte dans l’art de la joute et de la polémique oratoires qui lui permet de manier habilement concepts et arguments sans jamais approfondir les questions dont ils traitent de façon toujours superficielle sans en avoir une véritable connaissance.
Ils démontent les “trucs” couramment utilisés dans les débats par ces “eloquent chancers” lorsque, en fait, ils ne connaissent guère le sujet :
- prendre tôt la parole pour pouvoir développer les premiers les points évidents,
- garder au contraire “l’argument qui tue" pour la fin de sorte qu’il reste imprimé dans la mémoire de l’auditoire,
- interrompre un orateur dès qu’il marque une pause,
- introduire à point nommé une question purement réthorique,
- etc …
Ces éloquents généralistes et opportunistes (1) sont de fait tous formés à la même école : celle des études dites de PPE (Phiosophy, Politics and Economics) telles que notamment professées à l’université d’Oxford. L’essentiel de l’enseignement y porte plus sur la forme que sur le fond : comment débattre, battre et convaincre par la seule technique oratoire (qualifiée de “adversorial tutorial system”) sans vraiment connaitre le sujet en question.
Et les auteurs d’ajouter : “It’s a skill for life. Or at least fot governement ”
Poursuivant l’analyse de cet article, on comprend mieux comment cette “British bluffocracy” a pu engager aussi légèrement le RU dans l’aventure du Brexit sans jamais faire l’effort d’en approfondir les conséquences éventuelles - et comment leur réthorique bien huilée a pu convaincre une partie de l’électorat (la plus âgée, la plus rurale et la moins éduquée).
Il resterait aussi (surtout ?) à rechercher les raisons politico-culturelles - ainsi que les intérêts propres - qui ont poussé cette classe dirigeante à entreprendre, au nom de l’Establishment, cette croisade anti-européenne. On entrerait alors dans la thèse du “coup” ou du complot” qui, pour l’heure, reste encore à démontrer (2).
Quoiqu’il en soit, ce coup de projecteur - en forme de coup de gueule - des dénonciateurs de la “bluffocracie" britannique va certainement s’ajouter à la liste des problèmes lourds du système politique britannique révélés par l’affaire du Brexit qui ne manqueront pas d’agiter le pays dans les prochains mois, voire années.
Jean-Guy Giraud 18 - 08 - 2018
(2) http://regards-citoyens-europe.over-blog.com/2018/07/le-coup-du-brexit-suite-5.html