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ÉTAT DE DROIT V/ ÉTAT DU DROIT 

 


Une querelle terminologique est apparue dans les débats et polémiques politiques en France. 

 

Elle peut se résumer à une question simple : qu’est ce que « l’État de droit » ? 

 

Une confusion s’est en effet établie entre « État de droit » et « état du droit »

 

En fait, la distinction est simple, au moins sur le plan conceptuel :

 

  • « l’ État de droit »  (avec majuscule) est un principe de nature et de niveau constitutionnels selon lequel les relations entre les pouvoirs publics et les citoyens (ainsi que, le cas échéant, entre les citoyens eux-mêmes) sont régies par le droit - entendu comme un ensemble de règles pré-établies dont le respect s’impose à tous, 

  • « l’ état du droit » (avec minuscule) est constitué factuellement par l’ensemble de ces règles en vigueur au moment T et dont le respect s’impose en raison du principe défini ci-dessus. Ces règles sont fixées par le législateur à différents niveaux et peuvent être modifiées par celui-ci (et interprétées par le juge) selon les modalités fixées par ces mêmes règles.  

 

Le terme anglais de « Rule of law » est peut-être plus explicite : il exprime mieux le principe selon lequel  c’est le droit (« law ») qui gouverne (« rule »)  la société et que ce droit doit donc être respecté quels que soient son contenu ou sa position dans la hiérarchie des normes. 

 

 

« L’ État de droit » et « les valeurs » au niveau européen

D’autre part, une confusion peut être créée par le fait que la fixation et l’énonciation de ce principe horizontal de nature juridique et quasi « mécanique » (« l’État de droit ») sont souvent accompagnées par - et liées à - l’énumération dans le même texte de « valeurs » qui sont d’une autre nature telles que « la dignité humaine, la liberté, la démocratie, l’égalité, etc … ». 

 

C’est notamment le cas au niveau européen où ce principe et ces valeurs sont en quelque sorte assimilées dans le préambule et l’article 2 du Traité de Lisbonne :


"Article 2

L'Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d'égalité, de l'État de droit, ainsi que de respect des droits de l'homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités."

 

Et cette confusion est entretenue sous une autre forme par la définition officielle de l’ « État de droit » telle que proposée par le Conseil de l’UE qui définit ce concept comme une limite à l’action des pouvoirs publics et un processus d’élaboration de la loi » soumis à certaines règles :

 

« Qu'est-ce que l'État de droit ? En vertu de l'État de droit, tous les pouvoirs publics doivent toujours agir dans les limites prévues par la loi. La notion d'État de droit recouvre un processus d'élaboration de la loi qui soit transparent, démocratique et pluraliste et qui rende des comptes, une protection juridictionnelle effective, y compris l'accès à la justice, des juridictions indépendantes et impartiales et la séparation des pouvoirs.(…) » (1)

 

 

 En conclusion, il est fâcheux que des imprécisions de caractère sémantique et de définition précise des termes puissent provoquer une confusion grave de nature politique : « l’ État de droit » est un principe fondamental et intangible dont la violation menacerait l’ensemble de l’ordre juridique de toute société - alors que « l’état du droit » n’est que la compilation des règles légalement adoptées qui constituent cet ordre juridique.  

 

Cela va presque sans dire mais il est parfois utile de faire bon usage des termes … et des majuscules. 

 

 

Jean-Guy Giraud 13 - 10 - 2024

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