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VERS UN PLAN DE RELANCE INTERGOUVERNEMENTAL DE L’UE ?



Au terme des deux journées (17/18 Juillet 2020) consacrées - une nouvelle fois - à la négociation du paquet Budget/Plan de relance par les 27 membres du Conseil européen, il semblerait que l'issue finale ne puisse être qu’une absence d’accord ou un accord a minima manifestement inadapté à la gravité de la situation et comportant (ou excluant) des clauses contestables (ou indispensables) du point de vue institutionnel (1). 


Face à une telle situation, on peut s’interroger sur l’éventualité d’une voie alternative : celle d’un accord intergouvernemental limité au Plan lui-même et conclu entre certains Etats membres seulement.    


En fait, les délibérations des 17 et 18 Juillet semblent montrer qu’une forte majorité des 27 peut accepter ce Plan sur la base de la proposition initiale de la Commission. 


Cette majorité serait composée des 4 grands Etats (Allemagne/France/Italie/Espagne) qui représentent plus de 60% de la population et du PIB de l’UE, - et d’une douzaine de moyens et petits Etats tous officiellement favorables au Plan.  


Au total ce groupe pèserait près de 75%  de la population et du PIB de l’UE27.

Replacé dans ce cadre, cet accord pourrait être décidé et mis en oeuvre en dépit de l’opposition - du veto - exercé pour des raisons diverses par une petite minorité de chefs de gouvernements.  


Plusieurs précédents d’accords intergouvernementaux - dont certains ont été ensuite communautarisés - ont permis à l’UE de surmonter dans le passé le type de blocage auquel se heurte à présent le Conseil européen des 27. 


Ce fut par exemple le cas pour l’accord de Schengen ou, dans un domaine comparable, pour la création du mécanisme européen de solidarité financière


D’une certaine façon, le mécanisme de l’Euro lui même - bien que de nature communautaire - ne regroupe qu’une partie (majoritaire là aussi) des Etats membres qui représentent également près de 75% de la population et du PIB des 27. Il est d’ailleurs probable que la quasi totalité de ceux ci participeraient à un éventuel accord intergouvernemental sur le Plan.


Le vote du projet de budget pluri-annuel - ainsi détaché du Plan - pourrait même s’en trouver facilité en retrouvant sa forme classique qui se prête mieux à des arbitrages marginaux.   



Certes, cette alternative constituerait une modification majeure du projet communautaire et global Budget/Plan tel que conçu à l’origine.  


Le choc politique serait considérable. La dé-communautarisation du Plan et sa déconnexion du budget de l’UE poserait de difficiles problèmes institutionnels, juridiques et techniques. 


Certains éléments du Plan lui-même devraient sans doute être revus. 


Au total, on le voit bien, cette alternative serait à la fois complexe et réductrice - mais elle pourrait être présentée non pas comme une rupture au sein des 27 mais comme une forme de “coopération renforcée” à laquelle pourraient ultérieurement se joindre les Etats non participants à l’origine (2).


Un tel accord intergouvernemental ne serait à l’évidence que la moins mauvaise des solutions au blocage actuel - peut-être aussi moins mauvaise qu’un Plan a minima des 27, considérablement dénaturé ou affaibli. 


En toute hypothèse, l'évocation de cette voie alternative pourrait conduire les Etats réticents à revoir et abaisser leurs lignes rouges - rendant ainsi finalement possible un accord sur le paquet lui-même. 


Dans la situation dramatique où se trouvent actuellement l’Union et les Etats membres, il n’est tout simplement pas envisageable d’en rester à un échec sec et sans alternative. Surtout lorsque cet échec est le fait d’une petite minorité de chefs de Gouvernements ayant - provisoirement ? - perdu tout sens de solidarité et de loyauté européennes ou, plus gravement encore, de l’intérêt des citoyens européens dans leur ensemble.  

La nuit portant conseil, il est toujours possible qu’un accord acceptable par tous soit finalement trouvé le 19 Juillet. Mais cela ne devrait pas être fait au prix de concessions excessives qui rendraient ce Plan insuffisant ou inefficace.


Encore une fois, la seule perspective d’un éventuel accord séparé sur le Plan pourrait aider à la réflexion. 



Jean-Guy Giraud 19 - 07 - 2020

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(1) par exemple une ingérence du Conseil européen dans la mise en oeuvre du plan - ou l’absence de clause relative à l’état de droit. 

(2) l’hypothèse consistant à placer formellement le Plan dans le cadre juridique de l’article 20 TUE sur les coopérations renforcées pourrait aussi être examinée. Toutefois, les conditions, contraintes et limitations imposées par le Traité pourraient s’avérer incompatibles avec la nature et les objectifs du Plan. 

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