M. May s’apprête à demander au Conseil Européen d’assouplir d’une manière ou d’une autre le texte de l’accord du Brexit afin que son Parlement puisse l’approuver.
Cette concession porterait sur la question de la frontière nord irlandaise (le fameux “BackStop”) qui, de façon inexplicable, a dominé l’ensemble des négociations sur l’accord de retrait.
Il est probable qu’elle n’obtienne pas vraiment satisfaction, l’ensemble des États membres se montrant intraitables sur ce point - au moins autant que sur les autres.
Ce refus pourrait d’ailleurs avoir un effet positif : ouvrir la voie à un deuxième referendum aboutissant à une révocation du Brexit par le RU.
Mais cet épisode rappelle le malheureux précédent du 17/18 Février 2016 lorsque le Gouvernement britannique de M. Cameron avait exigé et obtenu du Conseil européen certaines concessions destinées à influencer le résultat du referendum dont il avait lui-même pris très légèrement l'initiative - et qu’il perdit malgré tout. .
Il avait notamment obtenu - sans grande difficulté - que soit vidés de toute substance les passages du Traité relatifs à “une Union sans cesse plus étroite” (1) et au “partage d’un destin commun”.
En effet les conclusions du Conseil européen stipulaient : "Les références à une union sans cesse plus étroite entre les peuples sont donc compatibles avec la possibilité, pour les différents États membres, d'emprunter différentes voies d'intégration, et elles n'obligent pas l'ensemble des États membres à aspirer à un destin commun.” (2)
Ainsi, par une seule phrase adoptée à l’unanimité dans l’indifférence générale (y compris de la part de la Commission et du Parlement), l’objectif historique fondamental du projet européen se trouvait réduit à néant - remplacé par une simple clause facultative et ambigüe. Bien que sans portée juridique réelle faute de révision formelle du Traité, cette clause témoignait malgré tout de la légèreté et de l’irresponsabilité des Chefs d’Etat et de Gouvernement.
On sait d’ailleurs que cette concession s’est avérée inutile et n’a jamais pris effet, le RU “n’ayant pas décidé de rester membre de l’UE".
Si nous avons souvent souhaité ici que le RU renonce finalement à sortir de l’UE (suite à un éventuel 2ème referendum), il ne faudrait pas que - d’une manière ou d’une autre - se trouvent malgré tout ainsi réactivées les précédentes et malheureuses conclusions du Conseil européen. Le prix serait, en fin de compte, trop lourd à payer.
Jean-Guy Giraud 12 - 12 - 2018
(1) Article 1 TUE : “ Le présent traité marque une nouvelle étape dans le processus créant une union sans cesse plus étoite entre les peuples de l'Europe“
(2) à noter que lors d’un précédent Conseil européen (Juin 2014), cette concession avait déjà été annoncée sous la forme suivante : " Le Conseil européen a noté que la notion d'union sans cesse plus étroite permet aux différents pays d'emprunter différentes voies d'intégration, en laissant aller de l'avant ceux qui souhaitent approfondir l'intégration, tout en respectant la volonté de ceux qui ne souhaitent pas poursuivre l'approfondissement. "