Du 12 au 15 Juin 2021 - à l’occasion de la tournée en Europe du Président Joe Biden - se sont tenues les rencontres très médiatisées du G7 - le sommet UE/USA - puis la réunion de l’OTAN.
Un autre évènement simultané est passée quasi-inaperçu : celui du somment UE/Canada avec la participation du Premier Ministre Justin Trudeau.
Le Canada, un partenaire de choix ...
Pourtant, le Canada est un partenaire de choix de l’UE sur le continent américain, tant sur le plan commercial que géo-politique comme le confirme la longue déclaration commune adoptée à cette occasion (1).
Après avoir rappelé les nombreux domaines dans lesquels les relations commerciales, économiques, industrielles, culturelles, … se développent avec succès entre les deux parties, cette déclaration rappelle que l’UE et le Canada sont unis par un “strategic partnership” de caractère politique visant à "promouvoir les valeurs démocratiques, de paix et de sécurité ainsi qu’un "ordre international basé sur le droit”.
Sur cette base, elles s’engagent à collaborer étroitement pour faire face ensemble aux problèmes et défis que soulèvent - notamment - leurs relations avec la Chine et la Russie, deux sujets très présents dans les autres rencontres du G7 et de l’OTAN. De même, la déclaration salue le renforcement du partenariat bi-latéral en matière de sécurité et de défense - tant dans le cadre de l’OTAN que bilatéralement (participation du Canada aux projets militaires du PESCO).
De fait, l’UE et le Canada ont signé en septembre 2017 non seulement un accord commercial d'envergure (le CETA) mais aussi un “accord de partenariat stratégique” de grande portée visant à coordonner leurs positions et leurs actions à l’échelle internationale - et tout particulièrement à oeuvrer ensemble vers un un système multilatéral solide et efficace, basé sur un ordre international respectueux du droit :
"The EU and Canada will continue to cooperate to promote an effective multilateral system that is rules- and rights-based, protects the global commons, promotes shared public goods, and delivers benefits for citizens across the globe,
We recognise that aneffective, relevant and resilient multilateral systemmust be capable of facing new global realities, including through reform and modernisation of multilateral institutions where necessary.” (2)
Ce partenariat politico-économique euro-canadien prend un relief particulier à l’heure où le G7 - sous la nouvelle impulsion des Etats-Unis - promeut un renforcement de l’ordre démocratique international (3) face non seulement aux pressions impérialistes, nationalistes, autocratiques et illibérales de grandes puissances telles que la Chine et la Russie mais aussi en raison de l’affaiblissement de cet ordre au sein même de l’Europe.
Dans ce contexte, on ne peut que se féliciter de l’étroitesse des liens de toute nature entre l’UE et son partenaire transatlantique canadien - doté à la fois de stabilité politique et démocratique ainsi que de dynamisme et ouverture économiques.
…mais une ombre au tableau
Une ombre au tableau cependant : adopté en 2014 et signé en 2017, l’accord UE-Canada n’est toujours pas ratifié par l’UE … Seuls 15 Etats membres ont à ce jour notifié l’achèvement de leurs procédures internes de ratification (4).
Parmi les “retardataires” figurent notamment l’Allemagne, la France, l’Italie, la Pologne … Si les raisons de ces délais sont variables (5), il n’en demeure pas moins que cette difficulté de l’UE à honorer la signature de ses engagements affecte sa réputation et sa fiabilité sur la scène internationale.
À ce sujet, on remarquera que les règles et procédures internes européennes en matière de conclusions d’accords internationaux demeurent particulièrement lourdes et complexes. En particulier, l’exigence de l’accord explicite de tous les organes parlementaires (y compris régionaux, le cas échéant) est une des causes principales de blocages récurrents.
Encore un problème de “gouvernance européenne” qui devrait être soulevé à l’occasion de la Conférence sur le futur de l’Europe !
NB la partie proprement commerciale de l’accord CETA a pu entrer en vigueur provisoirement - sans limitation de délai - dès sa signature en 2017. Toutefois, il suffirait qu’un seul des 27 rejette formellement cet accord (par exemple suite à un vote négatif au sein de son Parlement) pour que l’UE elle-même soit contrainte de rejeter l’ensemble de l’accord. Les deux autres parties du paquet euro-canadien (sur les investissements et sur le Strategic Partnership) ne pourront entrer en vigueur qu’après l’achèvement de toutes les procédures de ratification des 27.
Jean-Guy Giraud 20 - 06 2021
__________________________ (1) https://www.consilium.europa.eu//media/50431/20210614-joint-statement-final.pdf?utm_source=dsms-auto&utm_medium=email&utm_campaign=European+Union-Canada+summit+–+Joint+statement (2) sur l’accord de partenariat stratégique, voir : https://www.lesamisdutraitedelisbonne.com/post/ue-et-canada-le-partenariat-transatlantique-pour-un-ordre-libéral (3) Communiqué du G7 - 13 Juin 2021 : " Embrace our values as an enduring foundation for success in an ever changing world. We will harness the power of democracy, freedom, equality, the rule of law and respect for human rights to answer the biggest questions and overcome the greatest challenges” https://www.g7uk.org/wp-content/uploads/2021/06/Carbis-Bay-G7-Summit-Communique-PDF-430KB-25-pages-3.pdf (4) https://www.consilium.europa.eu/fr/documents-publications/treaties-agreements/agreement/?id=2016017 (5) pour la France, l’accord est bloqué au niveau du Sénat - pour l’Allemagne, des problèmes de constitutionnalité se posent - pour Chypre, un problème d’apellation …fromagère persiste - etc … Voir le dossier : “La saga du CETA” : https://aiace-europa.eu/wp-content/uploads/2017/05/vox-105-oib.pdf
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