Dans une précédente note intitulée "Libérer Fontex” (1), nous relevions à la fois la complexité des règles encadrant le fonctionnement de Frontex mais aussi sa forte dépendance vis à vis des autorités nationales. Celles-ci sont effectivement maitresses de la stratégie et des interventions de l’Agence qui, en dernier lieu, dépendent des décisions de son Conseil d’administration (composé des 27 représentants des EM) et, surtout, de de celles de l’Etat concerné sur le terrain. Un groupe de travail du PE vient de mener une enquête sur un prétendu refoulement de demandeurs d’asile au large des côtes grecques et sur la responsabilité de l’Agence dans cette opération. Au delà de l’analyse des faits qui reste passablement embrouillée, il apparait clairement que l’Agence n’a pas été en mesure de contrôler la légalité des mesures prises par les garde-côtes grecs ni même d’en être pleinement informée. Ainsi qu’il ressort d’un article de presse (2), le Directeur de l’agence a appliqué la procédure prévue en interrogeant les autorités grecques sur un éventuel incident. Celles-ci ont répondu en niant toute violation des droits des migrants. Et, pour le Directeur, l’affaire était close car celui-ci ne pouvait mettre en doute cette réponse : "If a national government, if a minister sends a letter to the director of an EU agency and says everything was according to the law, I cannot say 'I don't trust you'," he said. Le Président (slovène) et un membre du Conseil d’administration de Frontex ont fait la même réponse :
"Asked how he validates Greek information, Gašperlin said he doesn't. "I am not sure that it would be a good basis for the work," he said on Monday (15 March). Patrik Engström, a Swedish member of the management board, also refused to cast doubts. "I neither believe or disbelieve," he said, when pressed on whether he can trust the Hellenic Coast Guard's version of events"
Ces deux réponses ont été validées par la Commissaire responsable, Mme Johansson.
Il est probable - mais regrettable - que les responsables européens n’ont voulu mettre en cause ni les autorités nationales concernées ni le système lui-même. Celui-ci aboutit pourtant à :
confirmer l’impuissance relative de l’Agence vis à vis des organes gouvernementaux,
établir un régime d’irresponsabilité généralisée,
porter atteinte à la réputation de l’Agence et, par delà, à celle de l’UE.
Cette affaire sera-t-elle l’occasion de ré-examiner le statut de l’Agence afin de renforcer son autonomie d’action et de donner à la Commission une véritable responsabilité politique dans ce domaine ? Cela dépendra largement des conclusions que tirera le Parlement européen de son enquête. Car il ne faut guère attendre du Conseil ni même de la Commission quelque initiative visant à “libérer Frontex”. Jean-Guy Giraud 20 - 03 2021 __________________________ (1) https://www.lesamisdutraitedelisbonne.com/post/libérer-frontex (2) https://euobserver.com/migration/151269?utm_source=euobs&utm_medium=email
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