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LA TRÈS DÉLICATE QUESTION DE LA PRÉSIDENCE DU CONSEIL PAR LA HONGRIE - suite 1

Quatre jours seulement après le début dela Présidence hongroise (du Conseil de Ministres), Victor Orban et certains de ses Ministres ont déjà ouvertement défié les Institutions et la quasi unanimité des États membres par diverses déclarations et initiatives contraires à la ligne politique officielle de l’Union et aux procédures institutionnelles habituelles.


La plus récente et la plus inquiétante manifestation de ce défi est la visite inopinée de Victor Orban au Kremlin alors que se développe à grande échelle la violente agression russe en Ukraine.  


Depuis plusieurs mois, le Parlement avait ouvertement posé la question : un Gouvernement condamné à plusieurs reprises par la CJE pour violations du droit communautaire (notamment en matière d’état de droit) - qui se trouve en situation de possible sanction de la part du Conseil européen (avec une privation éventuelle de … son droit de vote sur la base de l’article 7 TUE) - qui oppose régulièrement (et isolément) son veto à de nombreuses décisions du Conseil (européen) ou se désolidarise d’elles, etc … peut-il loyalement exercer la Présidence de l’UE ?


Ni le Conseil (européen), ni la Commission n’ont voulu prendre une quelconque initiative pour remettre en question cet exercice. Il ne semble pas que la question ait même été sérieusement considérée au sein de ces deux Institutions.


Tout se passe comme si elles avaient pris le parti suivant : confrontée à la responsabilité d’une Présidence, le Gouvernement hongrois s’abstiendrait de nuire au bon fonctionnement des Institutions et se limiterait à une gestion quasi normale des affaires courantes.


D’autre part, le deuxième semestre de 2024 sera largement consacré à la mise en place de la Commission et du Parlement de sorte que l’activité législative du Conseil devrait en être réduite. La Présidence ne devrait donc pas être confrontée à de nouvelles initiatives d’envergure.


Enfin et surtout, tant le Conseil (européen) que la Commission ont craint de provoquer une crise politique majeure en privant - pour la première fois dans l’histoire de l’Union - un État membre d’un droit et d’un rôle auxquels  tous les États membres (et notamment les nouveaux et petits États) sont très attachés. Dans la période très délicate d’installation de deux Institutions renouvelées, l’UE s’en trouverait inopportunément déstabilisée.


On saura dans les prochaines semaines si ce pari était justifié ou si - au contraire - le Gouvernement hongrois instrumentalise sa présidence pour poursuivre ses initiatives d’opposition et de division au sein de l’UE.


Une autre question n’a guère été éclaircie ni même posée : l’ordre juridique communautaire permettrait-il de refuser ou de reporter la présidence d’un État membre ?


Si la réponse est négative, les positions de la Commission et du Conseil sont de facto et de jure justifiées. Mais on se trouverait alors face à une situation politique embarrassante : comment empêcher un État membre déloyal de nuire à l’intérêt général de l’Union qu’il est censé diriger et guider ?


Mais la réponse est peut-être positive. Divers arguments juridiques peuvent être invoqués pour justifier une privation ou un report de présidence - notamment ceux présentés ici :



Il serait donc utile de clarifier - à froid - cette question. En particulier - conformément au principe de transparence - les avis des services juridiques de la Commission et du Conseil sur ce point devraient être rendus publics. Il est en effet possible que le Gouvernement hongrois en arrive à dénaturer/détourner la fonction de présidence créant ainsi un redoutable précédent. Mais même si tel n’était pas le cas, il est dans l’intérêt de la sécurité juridique du fonctionnement de l’UE que l’affaire soit sérieusement étudiée.


Ne serait-ce que dans la troublante perspective d’une rotation de quelques 36+ présidences successives et « diverses » suite aux prochains élargissements.


Question qui trouverait naturellement sa place parmi  «  les réformes internes nécessaires pour faire en sorte que (…) les institutions de l'UE continuent à fonctionner et agir de manière efficace » - selon la très elliptique formulation des conclusions du Conseil européen du 27 Juin 2024.

 


Jean-Guy Giraud

O5 - 07 - 2024 

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