
Dans les tous prochains jours, le nouveauGouvernement israélien devrait affirmer sa position sur une éventuelle occupation ou annexion de tout ou partie de la vallée du Jourdain, soit un tiers de la Cisjordanie occupée.
La réaction de l’UE à cette nouvelle emprise devrait être fonction de l’ampleur et de la gravité de l’atteinte au droit international et au droit humanitaire qui serait impliquée par la décision israélienne.
On sait que l’Union a constamment affirmé son soutien à la solution dite des deux États :
“achieving a Two State solution based on parameters set out in the Council Conclusions of July 2014 that meets Israeli and Palestinian security needs and Palestinian aspirations for statehood and sovereignty, ends the occupation that began in 1967, and resolves all permanent status issues in order to end the conflict” (1).
Position réaffirmée à maintes reprises à l’occasion de chaque cycle de violence et d’actions unilatérales telles que l’occupation de territoires, l’érection de murs de séparation, l’imposition de blocus, les opérations militaires ou policières, ...
On sait aussi que l’UE est le principal fournisseur d’aide internationale aux populations palestiniennes : environ 300 millions d’euros par an pour la période 2017/2020, dotations qui devraient être reconduites dans le prochain budget pluriannuel 2021/2027. Auxquelles s'ajoutent les aides bi-latérales fournies par une majorité d’États membres (dont l’Allemagne, la France, les Pays Bas et la Suède).
Compte tenu de ces paramètres, on pourrait s’attendre à un geste politique fort de la part de l’Union si les intentions israéliennes se concrétisaient. Ce geste prendra sans doute la forme d’une nouvelle déclaration ex officio du Haut représentant de l’UE, M. Josep Borrel. Mais sera-t-il accompagné, soutenu par le Conseil et suivi de mesures concrètes dans le domaine des relations et accords entre Israel et l’UE ?
Rien n’est moins sûr. Comme l’écrit Le Monde du 25 Juin 2020 :
"les Vingt-Sept sont divisés. Nétanyahou s’est attaché les faveurs de nombre d’Etats d’Europe orientale. La politique étrangère de l’UE se décide à l’unanimité. L’affaire israélo-palestinienne est cruciale pour l’Europe. Elle se résume à une question, une seule. A l’unanimité, les Vingt-Sept peuvent-ils avoir une politique étrangère conséquente? Ou sont-ils condamnés à un tronc commun de banalités minimales confirmant une manière d’impuissance”
Certes l'UE voudra sans doute poursuivre - voire amplifier - son assistance aux populations palestiniennes concernées. Certes la solution des deux États se révèlera de plus en plus comme irréaliste sur le terrain et comme une cause perdue sur le plan diplomatique.
Mais une autre cause plus générale s’en trouvera affaiblie : celle du respect du droit international et humanitaire dont l’Europe s’est faite l’un des derniers défenseurs. Cause qui fait partie intégrante - avec la protection de l’Etat de droit, de la démocratie, des droits humains …- d’une certaine conception de l’ordre libéral mondial aujourd’hui contesté ou mis à mal par quasiment toutes les grandes puissances. Et qui est la principale raison et justification de sa volonté affirmée de renforcer son "leadership mondial responsable”(van der Leyen).
Dans cette affaire - comme dans d’autres - elle risque donc surtout de perdre un peu plus de son ambition, de son rôle et de son âme.
Jean-Guy Giraud 28 - 06 2020
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