L’heure du bilan a sonné pour la Commission Juncker.
Une étude approfondie du Service de Recherche du PE (1) détaille ce bilan - et celui-ci apparait comme particulièrement positif.
Le programme présenté en 2014 s’ordonnait autour de 10 groupes d’actions prioritaires (2) regroupant chacun de nombreuses propositions législatives dans les domaines les plus variés.
Une réussite quantitative incontestable
Sur le plan quantitatif, la réussite est évidente :
94% des propositions prévues (au total 547 textes) ont effectivement été présentées par la Commission,
66% de celles-ci ont été effectivement adoptées et 28% progressent à ce jour normalement,
7% seulement sont ralenties voire bloquées.
Le taux de succès (propositions adoptées) a été le plus grand dans les 4 groupes d’actions suivants :
Justice et droits fondamentaux (82%)
UE “global actor” - cad politique extérieure et aide au développement (78%)
Marché intérieur (77%)
Énergie (73%)
Par contre, le résultat a été décevant dans deux secteurs :
Politique commerciale (36%)
Emploi, croissance et investissement (39%)
En pratique, le nombre de propositions varie fortement selon les secteurs, par exemple :
176 (sur 547 au total) concernent le "Marché intérieur" et 80 sont liées à “l’Emploi, croissance et investissement"
alors que 14 seulement visent l’”Union démocratique” et 27 l’”UE Global actor”.
De même, la nature des propositions est extrêmement variable, certaines s’avérant beaucoup plus stratégiques/lourdes/complexes que d’autres.
L’analyse du Service de Recherche fournit d’ailleurs un commentaire détaillé des “grandes” propositions que nous laissons le lecteur découvrir (1).
Cette évaluation quantitative du bilan de la Commission Juncker montre que - par delà les polémiques suscitées par certains dossiers particuliers - le “gouvernement Juncker a fait le job”.
Un héritage solide
Partant d’un programme précis d’actions prioritaires regroupant les thèmes les plus importants pour la poursuite du projet européen, cette Commission a agi avec rigueur, méthode et persévérance - mais aussi avec toute la diplomatie et souplesse nécessaires pour obtenir l’accord du Conseil et du Parlement tant au sein de chacune des deux Institutions qu'entre elles.
Elle laisse à la prochaine Commission des bases solides et un terrain largement dégagé - ainsi que des méthodes d’action qui ont fait leurs preuves et une administration en bon état de marche.
Peu de gouvernements nationaux peuvent - mutatis mutandis - prétendre à un tel bilan.
Bien sûr, plusieurs grands dossiers sensibles ont insuffisamment avancé comme ceux relatifs aux migrations, à l’UEM, à la politique étrangère ou à la politique sociale. Les raisons de ces retards - voire de ces échecs provisoires - sont plus à rechercher au sein du Conseil que de la Commission.
Il convient d’ajouter que ce mandat s’est déroulé dans un environnement perturbé sur le plan international (par exemple en matière de migrations) comme au niveau européen (notamment du fait des poussées populistes et souverainistes).
Il n’est pas certain que les électeurs européens seront - en se rendant aux urnes fin Mai - vraiment conscients de ce bilan qui est celui de l’Union tout entière. La complexité, la variété et l’effet indirect de l’action communautaire en rendent la perception difficile. Ni les gouvernements, ni les partis politiques, ni la presse ne le mettront en valeur.
À défaut de gratitude, l’ “Administration Juncker" aura la satisfaction du devoir accompli. En attendant que, avec le recul, l’ampleur et la qualité de son travail soient pleinement reconnues.
Jean-Guy Giraud 04 - 05 - 2019
(2) "The 2014 priorities :
A new boost for jobs, growth and investment
A connected digital single market
A resilient energy union with a forward-looking climate change policy
A deeper and fairer internal market with a strengthened industrial base
A deeper and fairer economic and monetary union (EMU)
A reasonable and balanced free trade agreement with the United States
An area of justice and fundamental rights based on mutual trust
Towards a new policy on migration
Europe as a stronger global actor
A union of democratic change. "