Un choix simplifié ...
Le Conseil européen du 23 Mars a, en définitive, proposé au Gouvernement et au Parlement britanniques un choix relativement simple :
soit accepter l’accord de retrait (Deal) avant le 29 Mars
soit demander avant le 12 Avril un délai supplémentaire (par exemple d’ici décembre 2019) pour proposer une “marche à suivre” susceptible de préparer une décision finale.
(Si la deuxième option l’emportait, le Parlement devrait se prononcer dans les jours suivants sur la nature politique de cette "marche à suivre”. Celle-ci devrait prendre la forme d’une clarification démocratique nécessitant par exemple de nouvelles élections parlementaires et/ou un nouveau referendum. Trois options demeureraient possibles : Deal, No Deal, retrait de l’article 50. À noter que le Conseil Européen n’accepterait cette option que si le Gouvernement et/ou le Parlement prenaient un engagement sérieux et crédible sur les moyens de procéder à cette clarification).
… mais une procédure toujours aussi incertaine
Ce choix pourrait logiquement être soumis au Parlement tout aussi simplement sous la forme d’un seul vote alternatif sur les deux options. Deux votes successifs sur l’une puis l’autre des solutions seraient possibles mais plus risqués (aucune ne recueillant une majorité de voix).
Il est malheureusement probable que la complexité de la procédure parlementaire traditionnelle des Communes se prête mal à une telle simplicité décisionnelle - de sorte que plusieurs motions plus ou moins contradictoires, “décisives” ou “indicatives” risquent d’être successivement mises au voix sans garantir de résultat clair et définitif.
Une partie de l’imbroglio du Brexit réside précisément dans cette complexité historique à laquelle s’ajoute l’imprécision constitutionnelle des prérogatives respectives du Gouvernement et du Parlement du RU.
Le système est en fait conçu pour permettre à l’exécutif de gouverner librement en s’appuyant tacitement sur une majorité parlementaire et partisane. Il se bloque si cette majorité est trop divisée pour entériner, plus ou moins mécaniquement, les décisions du premier Ministre relayées par le Gouvernement. Le blocage devient complet lorsque le Gouvernement lui-même se divise.
Un “popular vote” national …
Dans ces circonstances, seul le recours direct au “popular vote” - cad aux élections ou au referendum peut permettre de trancher le débat.
C’est précisément ce qu’ont demandé les deux manifestations “monstres” de Londres - celle du 23 Mars étant la plus importante que le pays ait jamais connue : un million de personnes environ.
Manifestations auxquelles s’est ajoutée une pétition en ligne approchant à présent les … six millions de signatures. À noter que cette pétition franchit un pas de plus en demandant la révocation pure et simple du Brexit et le maintien du RU dans l’UE. Cette pétition devrait, “en principe”, être transmise directement pour considération au Parlement.
…mais d’abord européen
Enfin, pour faciliter les choses, le Conseil européen a contraint le RU de participer aux élections européennes des 23/26 Mai au cas où le Gouvernement - forcé par le vote des Communes - demanderait effectivement un délai supplémentaire de réflection. Dans l’état actuel de divisions internes des deux grands partis, on voit mal comment ils pourraient préparer ces élections - voire même constituer leurs listes respectives.
De la respectabilité des constitutions nationales
Les Traités européens affichent le plus grand respect pour les règles et pratiques constitutionnelles des États membres. De nombreuses décisions européennes doivent être ratifiées par chaque État selon ses propres règles en la matière, lesquelles peuvent s’avérer particulièrement exigeantes (par exemple en prévoyant des … referendums d'approbation).
C'est le prix à payer pour respecter la souveraineté et la “diversité" des États - serait ce au prix de leur “unité”. Mais le moins que l’on puisse attendre d’eux, c’est qu’ils soient effectivement capables de maitriser ces règles de façon à ne pas entrainer leurs partenaires dans des situations de blocage de l’ensemble de l’Union.
Jean-Guy Giraud 25 - 03 - 2019
NB voir sur le même sujet (!) :
https://www.lesamisdutraitedelisbonne.com/post-unique/2018/10/04/BREXIT-THE-CASE-FOR-A-“POPULAR-VOTE