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"PROTÉGEZ MOI DE MES AMIS, …"



À l’occasion de son vote sur le rapport annuel de la Médiatrice de l’UE (1), le Parlement européen s’est une fois de plus saisi de la question de la nomination du nouveau Secrétaire Général de la Commission, M. Martin Selmayr. Mais il a, cette fois, franchi une étape supplémentaire en exigeant la démission de l’intéressé :

§22 : "souligne que M. Selmayr doit démissionner de son poste de secrétaire général de la Commission, et invite la Commission à adopter une nouvelle procédure pour désigner son secrétaire général

Ce faisant, il a commis un double erreur, juridique et politique :

  • juridique parce qu’il n’appartient pas au PE (ni d’ailleurs à la Médiatrice) de se prononcer sur la légalité d’un acte de la Commission. Seule la Cour de justice peut en être saisie et statuer au regard du droit,

  • politique parce que l’intervention directe du Parlement dans la nomination des hauts responsables de la Commission n’est pas conforme au principe d’indépendance des Institutions et peut conduire à de regrettables abus.

En succombant ainsi à une intense campagne de presse menée - souvent ad hominem - contre cette nomination, le Parlement a outrepassé ses droits et sa fonction.

(Cela est d’autant plus regrettable que, trois jours avant ce vote, le Bureau du Parlement avait procédé - une nouvelle fois - à une série de nominations internes à la tête du Secrétariat empreintes de favoritisme et sans considération exclusive du mérite et de la compétence des personnes concernées.)

Une toute autre affaire - plutôt anecdotique - peut être ici mentionnée concernant la Cour de Justice de l’UE.

Dans un récent article publié par “euobserver” dans Politico (2), un ancien juge du Tribunal de la CJE (M. Franklin Dehousse) critique la jurisprudence de l’Institution en matière de communication/publication de documents administratifs internes. Cette critique porte notamment sur le refus de communication … du registre de l'utilisation des voitures de fonction des membres.

À l’occasion de cette affaire (ainsi que d’autres concernant la Commission) l’ancien juge met en cause la jurisprudence de la Cour en la matière,estimant qu'elle nuit au principe de transparence des Institutions - ainsi que le suggère le titre de l’article en question : “Are judges destroying transparency in EU Institutions ?” .

Par ailleurs, cet article est publié alors que la Cour est en train de délibérer sur une requête introduite par son auteur lui-même.

Quel est le lien entre ces deux questions ? Il se réfère à l”adage “protégez moi de mes amis, mes ennemis je m’en charge” . On sait que le Parlement, la Commission, la Cour (et la BCE) sont les Institutions “indépendantes" de l’UE qui assument le plus directement la défense et le progrès du projet européen. Lorsque, pour des motifs somme toute secondaires, elles s’opposent mutuellement ou en interne c’est ce projet lui-même qui s’en trouve indirectement affaibli.

Alors que l’UE se trouve - à la veille des élections européennes - en grand danger de désunion et de paralysie, une certaine réserve devrait prévaloir de la part de ses “amis” en évitant notamment de fournir à ses adversaires de fallacieux outils de combat.

Jean-Guy Giraud 31 - 12 - 2018


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