On sait que la question de la frontière irlandaise joue un rôle de premier plan - assez inattendu (1) - dans les négociations sur le Brexit.
Dans cette affaire, il est incontestable que l’UE - soutenue par le Gouvernement irlandais - est principalement motivée par un souci d’ordre humanitaire : éviter que le rétablissement d’une frontière matérielle ne déstabilise à nouveau cette région en provoquant une rupture du "Good Friday Agreement" de 1998 qui a mis fin à des années de conflits sanglants entre les deux communautés rivales.
Ce que l’on sait moins, c’est que l’UE poursuit activement, depuis cet accord, un programme “PEACE” (2) destiné à “encourager la paix et la réconciliation et promouvoir le progrès économique et social en Irlande du Nord et dans la région frontalière avec l’Irlande”.
Ce programme en est aujourd’hui à sa phase PEACE IV qui couvre la période 2014/2020. La Commission a proposé qu’il soit poursuivi après le Brexit en dépit de la non-éligibilité de la partie irlandaise sous autorité britannique aux Fonds structurels européens.
Concrètement, le programme PEACE a initié et financé une large gamme de projets d’aide :
aux victimes et aux rescapés du conflit,
aux projets éducatifs communs,
au soutien des jeunes et des PME,
aux projets d’infrastructures et de renouvellement urbain,
à la création d’emplois durables et à la mobilité de la main d’oeuvre,
à la lutte contre la pauvreté,
à l’assistance technique,
etc ..;
Au total, l’UE a fourni - de 1995 à 2018 - une aide de l’ordre de 1,5 milliards d’euros, à laquelle il faut ajouter la contribution financière de l’UE au "Fonds international pour l’Irlande" (FII).
Si l’UE n’attend guère de signes de gratitude de la part des autorités d’Irlande du Nord ou même du Royaume Uni - elle est tout de même en droit de tenter d’éviter que le Brexit ne ruine tous ces efforts de réconciliation et de développement accomplis sur une période de 20 années.
D’autant plus que le blocage britannique sur cette question est principalement motivé par une exploitation politique assez outrancière de la notion de “souveraineté” qui serait menacée par l’instauration de contrôles techniques sur les marchandises à destination de l’Irlande du Nord.
Jean-Guy Giraud 30 - 10 - 2018